DOSSIER: L’ENERGIE NUCLÉAIRE DANS
LE MONDE
L’énergie nucléaire contribue pour environ dix pour cent à la
production mondiale d’électricité (situation fin 2019). Sur les 31 pays qui
exploitent des centrales nucléaires dans le monde entier, 13 – dont la Suisse –
couvrent plus d’un quart de leurs besoins en électricité avec des centrales
nucléaires. Sur les 36 nations de l’OCDE, 18 produisent de
l’électricité via de telles centrales. Dans ces pays, la part de l’énergie
nucléaire est, en moyenne, d’un peu moins de 30%. En 2019, ce sont les Etats‑Unis
qui ont produit le plus d’électricité nucléaire avec 96 installations (deux
sont en construction), devant la France (58 réacteurs), la Chine (47 réacteurs)
et la Russie (38 réacteurs).
Fin 2019, on recensait dans le monde 442 réacteurs en
exploitation dans 31 pays. Sur les 33 centrales nucléaires japonaises en état
de fonctionnement, seules neuf étaient connectées au réseau fin 2019. Les
autres étaient à l’arrêt. Au Pays du Soleil Levant, depuis l’accident de
réacteur de Fukushima-Daiichi, en 2011, toutes les centrales nucléaires
opérationnelles ont été peu à peu déconnectées du réseau. Là-bas, les
exploitants ne peuvent redémarrer les réacteurs que s’ils réussissent toutes
les étapes de la procédure de remise en service renforcée.
Contrairement à l’Allemagne et à la Suisse, la plupart des
autres pays disposant de l’énergie nucléaire continuent d’investir dans cette
technologie qui préserve les ressources et l’environnement. Ainsi, fin 2019, 53
centrales nucléaires étaient en construction dans le monde, dont 11 en Chine.
Après Fukushima,
de nombreux pays ont fait inspecter leurs installations nucléaires et revu leur
politique énergétique. Dans le contexte post-Fukushima, les pays de l’UE et la
Suisse ont soumis leurs centrales nucléaires à un test de résistance afin d’éliminer les éventuelles
lacunes de leurs installations. En Suisse, l’autorité de surveillance
nucléaire, l’IFSN, a ordonné de vastes contrôles de sécurité. Elle a lancé un
plan d’action pour exploiter les enseignements tirés de l’accident japonais. Ces travaux se sont achevés fin 2016. Les résultats des
tests de sécurité étaient fondamentalement bons pour la Suisse, même si
certains points faibles potentiels peuvent être éliminés et les marges de
sécurité augmentées.
La succession des faits lors de l’accident de Fukushima a été
analysée avec précision dans le monde entier. Le gouvernement japonais et une
commission nommée par le Parlement ont conclu que l’origine n’était pas la
technique, mais une culture de la sécurité insuffisante : les connaissances en
la matière acquises au fur et à mesure sur le plan international n’avaient pas
été prises en considération et intégrées sous forme de rééquipements
techniques, comme par exemple en Suisse. Si les normes internationales avaient
été respectées dans l’installation de Fukushima, l’accident ne serait pas
arrivé.
Etant donné que du point de vue technique, il n’y a pas de
raison de renoncer à l’énergie nucléaire et à ses avantages importants dans la
mesure où l’on respecte les normes internationales, quasiment toutes les
nations disposant de l’énergie nucléaire poursuivent leurs programmes
nucléaires civils. Il y a en outre toute une série de pays qui réfléchissent à
la possibilité d’entrer dans le nucléaire. Ainsi, le Bangladesh, la Biélorussie,
les Emirats arabes unis et la Turquie ont déjà lancé la construction de leurs
premières centrales. Aujourd’hui, plus de 130 centrales nucléaires sont en
phase d’étude ou d’autorisation de par le monde. Une proportion significative
de ces projets concerne l’Asie, notamment la Chine et l’Inde. L’Agence
internationale de l’énergie atomique (AIEA) s’attend à une forte augmentation
de l’utilisation de l’énergie nucléaire dans cette région.
Travaux de construction aux Etats-Unis et en Europe de l’Ouest
Aux Etats-Unis, le Congrès a adopté une nouvelle loi sur
l’énergie durant l’été 2005 qui encourage les énergies dégageant peu de CO₂ et
ouvre ainsi largement les portes à la construction de nouvelles centrales
nucléaires. L’Etat a rationalisé la procédure d’autorisation et assume le
surcoût des six premières nouvelles centrales nucléaires au cas où l’opération
prendrait du retard sans que le maître d’ouvrage puisse en être tenu
responsable. Jusqu’au début 2010, des demandes de construction et
d’exploitation pour un total de 28 centrales nucléaires ont été adressées à
l’autorité de surveillance. Toutefois, environ la moitié des demandes ont été
retirées par leurs auteurs pour des raisons économiques. Jusqu’à mi-2018,
l’autorité a donné son accord pour la construction de 14 centrales nucléaires.
Seules deux d’entre elles sont actuellement en construction.
Les Etats-Unis encouragent toutes les formes d'énergie pauvres
en CO2: ici, la construction d'une des deux nouvelles tranches nucléaires sur
le site de Virgil C. Summer, en Caroline du Sud. (Photo: SCE&G)
En Europe, la Finlande construit sa cinquième centrale
nucléaire à Olkiluoto.
Il s’agit d’un réacteur européen ultramoderne à eau sous pression (EPR). De
plus, les préparatifs pour la construction d’une nouvelle centrale nucléaire en
Finlande sont en cours. Le pays veut ainsi réduire sa dépendance vis-à-vis des
importations de courant en provenance de Russie. En Europe, un autre EPR est en
construction depuis fin 2007 en France, sur le site de Flamanville, en Normandie.
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La première centrale nucléaire française du type EPR doit commencer à produire de l’électricité aux alentours de 2020. (Photo : EdF) |
Début 2008, le gouvernement britannique a décidé de remplacer
ses centrales nucléaires vieillissantes par de nouvelles. La Grande-Bretagne
prévoit actuellement d’augmenter sa capacité nucléaire de 16’000 mégawatts sur
huit sites d’ores et déjà définis. Le Royaume doublerait ainsi la part du
nucléaire, de 20% actuellement à plus de 40%. Ceci explicitement pour réduire
sa dépendance vis-à-vis des énergies fossiles ainsi que ses émissions de gaz
polluants à effet de serre. Le projet de construction de Hinkley Point, dans le sud de
l’Angleterre, où deux réacteurs de type EPR doivent être construits, est le
plus avancé.
Europe de l’Est : du charbon et du gaz à l’énergie nucléaire
Plusieurs pays d’Europe centrale et d’Europe de l’Est misent
aussi sur l’énergie nucléaire. Ils veulent réduire leur dépendance vis-à-vis du
charbon et des importations de gaz naturel ou remplacer leurs centrales
nucléaires existantes par de nouvelles installations modernes. En Slovaquie,
deux réacteurs de modèle russe sont ainsi en construction. La Roumanie a mis en
service sa centrale nucléaire la plus récente en 2007 (Cernavoda 2, un réacteur
canadien Candu à eau lourde). Le pays prévoit de construire deux autres unités
du même type au cours des prochaines années avec l’aide chinoise.
La construction de nouvelles centrales nucléaires en Bulgarie,
en République tchèque et en Lituanie est également sérieusement envisagée. La
Hongrie aussi souhaite construire de nouvelles centrales nucléaires. En 2014,
elle a donc conclu un accord avec la Russie pour la construction de deux
tranches.
La Russie et l’Asie misent sur l’énergie nucléaire
La Chine est passée tardivement à l’énergie nucléaire. Le pays
n’a mis sa première centrale nucléaire en service qu’au début des années 1990.
Aujourd’hui, 43 centrales nucléaires approvisionnent le pays en électricité
(situation: septembre 2018). Leur part dans le mix électrique chinois est de
4%. Cette proportion va fortement augmenter au cours des prochaines années:
plus d’une douzaine de centrales nucléaires sont en construction et trois
douzaines sont à un stade de planification avancé. Le Bangladesh et la Corée du
Sud mènent eux aussi des activités de construction et les deux pays ont chacun
lancé la construction de leurs deux premières centrales.
La Russie et l’Inde poursuivent également des projets de
développement ambitieux. La Russie souhaite mettre en service deux nouvelles
constructions par an afin de pouvoir exporter davantage de gaz naturel à bon
prix en Europe de l’Ouest. Fin 2017, sept réacteurs étaient en construction,
parmi lesquels la première centrale nucléaire flottante au monde dont les deux
petits réacteurs permettront l’alimentation en électricité et en chauffage de
l’Arctique russe. En Inde, six réacteurs étaient en construction fin 2017 et
environ 20 installations supplémentaires étaient prévues. Le Pakistan ajoute
deux nouveaux réacteurs aux quatre dont il dispose déjà.
Le Proche-Orient et l’Amérique latine s’y mettent
Il est remarquable que les Emirats arabes unis, qui disposent
d’importants gisements de pétrole, aient décidé de miser pour l’avenir sur
l’énergie nucléaire: en été 2012, ils ont commencé à construire la première de quatre centrales
nucléaires du type coréen. Celle-ci devrait commencer à produire de
l’électricité en 2019. Les quatre réacteurs devraient tous être en service
d’ici à 2020/2021. La Turquie elle aussi prévoit d’entrer dans le nucléaire. La
première centrale nucléaire du pays est ainsi en construction depuis avril 2018
sur le site d’Akkuyu, sur le littoral méditerranéen, et quatre autres réacteurs
sont prévus sur le site de Sinop, dans le nord du pays.
L’Iran a mis sa première centrale nucléaire en service en
2011. Le pays souhaite construire d’autres réacteurs avec l’aide russe. Des
réacteurs russes doivent également être construits en Egypte, qui n’exploite
actuellement aucune centrale nucléaire. L’Argentine, le Brésil, le Mexique et
l’Afrique du Sud préparent actuellement l’extension de leur parc nucléaire
actuel. En Argentine, la troisième centrale nucléaire du pays a été mise en
service début 2014. La troisième centrale nucléaire brésilienne doit commencer
à produire de l’électricité en 2023.
De bonnes raisons de construire de nouvelles centrales nucléaires
Ces constructions sont motivées par de bonnes raisons:
- Les centrales
nucléaires du boom des années 1970 vont atteindre le terme de leur durée
d’exploitation économique prochainement. Il faut penser suffisamment tôt à
leur remplacement.
- La demande en
électricité ne cesse d’augmenter à travers le monde, notamment dans les
pays émergents à forte population comme le Brésil, la Chine ou l’Inde qui,
depuis des années, affichent une forte croissance économique. D’après les
estimations de l’Energy
Information Administration américaine, la demande mondiale en
électricité pourrait quasiment doubler d’ici à 2025.
- La stabilité des prix
de l’énergie nucléaire, qui, contrairement aux sources d’énergie fossiles,
ne dépendent pas du prix du combustible, rend l’énergie nucléaire
attrayante.
- Les nouvelles
énergies renouvelables ne peuvent pas être régulées et ne produisent pas
de façon adaptée aux besoins.
- La protection de
l’environnement et la raréfaction des matières premières plaident en
faveur de l’énergie nucléaire qui ne rejette quasiment pas de gaz à effet
de serre et préserve l’environnement.
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