Madagascar lance un vaste projet de reforestation
Alors
que le pays a perdu 44 % de ses forêts naturelles de 1953 à 2014, le
gouvernement malgache a annoncé vouloir replanter 60 millions d’arbres par an.
Le reboisement total devrait couvrir 400 km², soit quatre fois la taille de
Paris.
«
Nous allons replanter 60 millions d’arbres soixante ans après l’indépendance de
Madagascar » a affirmé le président de la république malgache Andry Rajoelina
lors d’une conférence de presse tenue au palais de l’Elysée en mai 2019. Huit
mois plus tard, environ 12 000 personnes étaient présentes dans les plaines du
district d’Ankazobe, à 100 kilomètres au nord-ouest de la capitale,
Antananarivo, pour entamer ce vaste projet de reboisement. Selon nos confrères
du Monde « 1.2 million de jeunes plants auraient été mis en terre sur 500
hectares (ha) à Ankazobe » dimanche 21 janvier 2020.
L’objectif est de
replanter 60 millions d’arbres d’espèces différentes en un an, dont des acacias
(Acacia farnesiana), des eucalyptus (Eucalyptus robusta) ou encore des arbres
fruitiers, des girofliers et des vanilliers.
Le
but premier est de lutter contre le changement climatique mais également de
sensibiliser et mobiliser toute la population pour cette grande campagne de
reboisement, comme l’explique Luciano Razafimahefa, responsable auprès du
service communication du ministère de l’Environnement et du développement
durable à nos confrères du journal malgache Moov,« tout le monde est incité à
venir».
Les Malgaches pourront prendre part à l’initiative car des pépinières
ont été mises en place dans tout le pays et des jeunes plants seront mis à
disposition gratuitement. Afin d’étendre l’opération à des zones isolées, le
gouvernement prévoit de larguer des graines par drones et avion, comme le jour
du lancement où environ cinq tonnes de plants auraient été larguées depuis un
avion.
DE L’ÎLE ROUGE À L’ÎLE VERTE
Une
bonne nouvelle pour la 5e plus grande île du monde puisque Madagascar
représenterait un des cas de déforestation les plus alarmants du monde
tropical. Chaque année, 150 000 hectares de forêts naturelles disparaissent. Un
fait d'autant plus alarmant que les forêts malgaches abritent la quasi-totalité
des espèces endémiques de l'île. Cette déforestation massive de la foret
malgache est principalement due à la culture sur brûlis (riz pluvial, maïs,
arachide), qui avait pour but premier de nourrir les habitants de l’île mais
qui s’est aussi développé depuis quelques années pour l’exportation, au
détriment des forêts.
COMPRENDRE : LES FORÊTS HUMIDES
Les forêts humides abritent plus de la moitié de la
faune et de la flore de notre planète. Apprenez-en plus sur les forêts humides
tempérées et tropicales, comment elles contribuent à l'écosystème de la Terre
et les efforts de conservation réalisés pour protéger ces espaces.
Pour subvenir aux besoins alimentaires de la population en constante
augmentation, un grand nombre de paysans doivent chercher de nouvelles terres
cultivables, notamment dans les forêts.
LA REFORESTATION COMME ARME CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE
Selon une étude menée par l’Institut fédéral de
technologie de Zurich, la reforestation serait la méthode naturelle la plus
efficace dans la lutte contre le réchauffement climatique. Plus précisément, il
faudrait planter 1 200 milliards d’arbres pour qu’une fois matures ceux-ci
absorbent les deux tiers des émissions de CO2 produites par l’activité humaine.
Les chercheurs suisses insistent sur la faisabilité de ce projet : sans
compter les villes et les terres agricoles, ces derniers estiment que « 0.9 milliards d’hectares dans le monde pourraient
être reboisés, principalement aux États-Unis, au Canada, au Brésil et en
Chine ».
De fait, les océans et les forêts constituent les principaux puits de
carbone sur Terre. Les arbres absorbent le CO2 de l’atmosphère via la photosynthèse
au niveau des feuilles mais stockent d’ énormes quantités de carbone dans le
tronc et les racines. Il serait donc logique et pertinent d’agir sur
l’efficacité de ces deux biotopes.
Carte montrant la déforestation à Madagascar entre 1953 et 2017 ( Vieilledent et al., CIRAD ). |
« C’est très positif que le gouvernement ait pris conscience de
l’importance de la conservation et de la restauration des forêts, pour la
biodiversité, la lutte contre le changement climatique et le bien-être des
populations locales » estime Ghislain Vieilledent, chercheur en écologie et
spécialiste des forêts tropicales au CIRAD, un centre de recherche français
travaillant en partenariat avec les pays du sud. Ayant vécu à Madagascar, il
étudie depuis plus de 10 ans les forêts et la biodiversité malgache.
Le chercheur craint malgré tout des effets d’annonce et insiste sur
l’importance des « forêts naturelles », des forêts qui abritent le plus de
biodiversité spécifique à Madagascar et qui stockent le plus de carbone.
« Dans
les faits, à propos de ce qui est mis en place, c’est discutable en matière
d’efficacité, on se concentre sur les espaces à reforester mais l’action
principale qu’il faudrait entreprendre est de conserver les forêts existantes.
Reforester difficilement 40 000 ha par an alors que 150 000 ha de forêt
naturelle disparaissent chaque année, cela n’a pas vraiment de sens ».
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