Afrique
: les forêts tropicales risquent d'émettre bientôt plus de CO2 qu'elles n'en
capturent
Une équipe d'une douzaine de chercheurs, en Europe et en Afrique, a suivi la croissance des arbres et leur mortalité sur cinquante ans dans des forêts d'Afrique.
Afrique
et Amazonie, même combat : la capacité des forêts tropicales à absorber les gaz
à effet de serre est en nette diminution. Actuellement, ces forêts représentent
50% des capacités mondiales de séquestration de carbone, mais elles atteignent
rapidement la saturation. Début mars 2020, des chercheurs ont même averti que
bientôt (dans 15 ans environ pour la forêt amazonienne), les forêts tropicales
produiraient plus de carbone qu'elles n'en captent.
Les
arbres diminuent la quantité de CO2 dans l'atmosphère, quand la quantité de
carbone qu'ils absorbent à travers la photosynthèse dépasse le CO2 émis à leur
mort, dans un incendie, après une sécheresse ou à cause de la déforestation.
Cette capacité de captation chute plus vite en Amazonie que dans les forêts
d'Afrique subsaharienne.
Une diminution de la capacité d'absorption avec dix ans d'avance
Une
équipe d'une douzaine de chercheurs, en Europe et en Afrique, a suivi la
croissance des arbres et leur mortalité sur une période de cinquante ans dans
des forêts africaines. Ils ont ensuite comparé ces données à des informations
similaires sur la forêt amazonienne.
Conclusion,
si certaines forêts ont grandi plus vite, dopées par le dioxyde de carbone dans
l'atmosphère, ces maigres gains sont effacés par les arbres tués par les feux,
les sécheresses et les pics de température. En extrapolant ces données sur les
20 prochaines années, leur étude, publiée dans le journal scientifique Nature,
estime que la capacité des forêts africaines à absorber le carbone va décliner
de 14% d'ici à 2030, et que celle de l'Amazonie va atteindre zéro avant 2035.
"Cette
baisse est en avance de dizaines d'années sur les prédictions les plus
pessimistes", souligne Wannes Hubau, un expert des écosystèmes forestiers
au Musée royal de l'Afrique centrale, à Bruxelles. "La mortalité est une
étape naturelle du cycle de la vie des arbres de forêt. Mais en injectant
autant de CO2 dans l'air, nous avons accéléré ce cycle", a-t-il déclaré à
l'AFP.
"Revoir nos modèles climatiques"
Plusieurs
des scénarios envisagés par les accords de Paris sur le climat en 2015 partent
du principe que les forêts vont continuer d'absorber le CO2 sur le long terme.
Plusieurs pays ont aussi annoncé des projets pour planter plus d'arbres, tout
comme de grands groupes industriels qui comptent ainsi compenser leurs
émissions. Cependant, affirme M. Hubau, "nous allons devoir revoir nos
modèles climatiques, mais également les stratégies de compensation que nous
avions basées sur ces modèles".
Les
conclusions de l'étude devraient pousser à revoir à la baisse la quantité de
carbone que l'humanité peut produire sans dépasser l'objectif d'une hausse de
la température mondiale moyenne de 2 degrés, fixée par les accords de Paris,
selon Anha Rammig, de l'Université technique de l'Ecole des Sciences de la vie,
à Munich, en Allemagne.
"En même temps qu'une protection accrue de la forêt
tropicale, une réduction encore plus rapide que prévu des émissions humaines de
gaz à effet de serre sera nécessaire pour éviter un changement climatique
catastrophique", a-t-elle écrit de manière catégorique dans une
présentation de la recherche.
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