Biodiversité : près de 40 % des plantes dans le monde sont rares - Africa Green Magazine

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Biodiversité : près de 40 % des plantes dans le monde sont rares

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Biodiversité : près de 40 % des plantes dans le monde sont rares

Grâce à la plus grande base de données botaniques jamais réalisée, une équipe internationale de chercheurs a pu comptabiliser l'abondance de chaque espèce de plantes sur la planète et conclure que près de 40 % sont rares et plus de 28 % très rares, accentuant de fait leur fragilité. Encore plus alarmant : les zones où se concentrent ces espèces rares sont bien plus impactées par le changement humain et climatique que la moyenne.

C'est un véritable travail de fourmi auquel s'est attelée une équipe de 35 chercheurs internationaux dans une étude publiée en novembre dans Science Advances. Celle-ci a passé 10 ans à collecter plus de 20 millions d'observations de plantes terrestres sur tous les continents, pour établir la plus grande base de données de biodiversité botanique jamais créée. On disposait jusqu'ici de données locales, ne permettant pas d'évaluer l'abondance globale d'une espèce. Certains plantes sont par exemple très communes à un niveau régional, mais ne sont implantées que dans un seul pays ou un seul territoire.

 Grâce à leur gigantesque répertoire mondial, les chercheurs ont pu identifier 435.000 espèces sur la planète, dont 36,5 % étant qualifiées de « rares », c'est-à-dire n'ayant été observées qu'à moins de cinq reprises, et 28,3 % « d'extrêmement rares », observées moins de trois fois.
Les espèces de plantes rares se trouvent principalement dans les régions montagneuses ou côtières d’Amérique centrale, d’Afrique et d’Asie du Sud-Est, ainsi que dans les îles. © Brian Enquist et al, Science Advances, 2019  

Les plantes passe-partout, « Starbucks » de la botanique mondiale

« Il y a certaines plantes que l'on trouve partout - ce sont un peu les « Starbucks » des espèces. D'autres au contraire sont très rares, comme un petit café indépendant dans une ville », illustre Brian Enquist, professeur de biologie évolutive à l'université d'Arizona et principal auteur de l'étude. Ces espèces rares se concentrent dans les régions montagneuses ou les forêts du continent américain (notamment les Andes et la Sierra Madre au Mexique, la forêt Atlantique au Brésil ou les Caraïbes), en Afrique (pointe de l'Afrique du Sud, Madagascar, hauts plateaux d’Éthiopie ou péninsule somalienne), et en Asie (sud-est de la Chine, Birmanie, Laos, chaîne de montagnes irano-turques).

 En Europe, les régions accueillant le plus d'espèces rares se trouvent autour de la Méditerranée et dans les Pyrénées. « Ces endroits ont bénéficié d'un climat relativement stable depuis la dernière glaciation, ce qui a permis aux espèces de persister jusqu'à aujourd'hui », explique Brian Enquist.

Les régions où se concentrent les espèces rares sont aussi les plus impactées par les activités humaines et celles où le réchauffement climatique est le plus rapide. © Brian Enquist et al, Science Advances, 2019  

Des territoires où l’impact humain est 1,6 fois supérieur à la moyenne

Malheureusement, ce sont justement ces « points chauds » de biodiversité qui risquent le plus de souffrir du changement climatique et de la destruction de leur environnement à l'avenir, s'inquiète le scientifique. « Dans la plupart de ces régions, on observe une urbanisation galopante, un fort développement de l'agriculture et la déforestation ». Les chercheurs ont ainsi calculé que l'empreinte de l'Homme sur ces zones fragiles est 1,6 fois supérieure à la moyenne. De plus, leur vitesse de réchauffement est 1,2 fois supérieure. « Les espèces rares situées dans ces territoires vont devoir subir un changement de température 200 fois plus rapide que ce qu'elles ont connu depuis les 21.000 dernières années », note l'étude.

Plus de 158.000 plantes rares menacées d’extinction

Du fait de leur rareté, plus de 158.000 espèces de plantes risquent ainsi de disparaître de la planète durant les prochaines années, ont calculé les chercheurs. Un chiffre largement supérieur à ceux de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui recense 3.027 espèces « en danger critique », 5.053 espèces « en danger » et 6.280 espèces « vulnérables ».

En juin, une étude parue dans la revue Nature Ecology & Evolution alertait déjà sur un taux d’extinction « alarmant » de la biodiversité végétale. Depuis 1900, trois espèces de plantes disparaissent ainsi chaque année, un rythme 500 fois plus rapide que celui que l'on devrait observer sans intervention humaine. En septembre, l'UICN signalait que 40 % des espèces d'arbres en Europe étaient menacées. « Nous avons impérativement besoin de plans d'action spécifiques pour protéger ces points chauds de biodiversité », insiste Patrick Roehrdanz, coauteur de l'article de Science Advances et  chercheur à l'organisation Conservation International.

Afrique : plus d’un tiers de la flore tropicale est menacé d’extinction

Malgré l'urgence, la plupart des écosystèmes terrestres ne disposent pas d'une évaluation de leur risque d'extinction. Une équipe de botanistes vient de mettre au point une méthode complémentaire au dispositif d'évaluation de la liste rouge de l'UICN, qui va permettre d'accélérer ce recensement. Les premiers résultats ont révélé une flore tropicale africaine, déjà bien menacée et très fragilisée.

Le tiers des espèces de plantes tropicales en Afrique sont probablement ou potentiellement menacées d'extinction, selon une estimation approximative publiée mercredi dans la revue Science Advances. La liste de référence, pour les espèces menacées, est la fameuse « liste rouge » tenue par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Mais si cette liste est relativement complète pour les mammifères et les oiseaux, elle est pleine de trous pour les plantes, dont moins de 10 % sont évaluées. Le travail de recensement est très fastidieux, consommateur de temps, et il existe plus de 350.000 espèces de plantes sur la planète.
Des chercheurs, coordonnés par Thomas Couvreur, botaniste français de l'Institut de recherche pour le développement, ont contourné ce problème en réalisant une première analyse automatisée du statut de plus de 22.000 plantes vasculaires tropicales africaines, en utilisant les données compilées dans la base Rainbio, tenue par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, une institution française.
Des gorilles (à gauche) dans la forêt du parc national de Kahuzi-Biega en République démocratique du Congo

Un dispositif complémentaire pour évaluer le danger d'extinction

Le résultat est que 32 % des espèces, soit près de 7.000, ont été classées comme probablement ou potentiellement menacées, sur la base de deux critères reconnus par l'UICN et concernant la réduction récente de la taille de la population ou de sa répartition géographique. Les régions les plus exposées sont l'Éthiopie, le centre de la Tanzanie, le sud de la République démocratique du Congo et les forêts d'Afrique de l'Ouest.

Cette méthode rapide « est une façon peu coûteuse d'initier le processus d'évaluation de la liste rouge pour un grand nombre d'espèces », écrivent les chercheurs. Mais « les deux approches sont complémentaires, ajoute Thomas Couvreur dans un communiqué. Un effort international important reste à fournir pour évaluer toutes les espèces de plantes en Afrique. »


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