Au Sénégal, la Banque africaine de développement apporte son soutien pour renforcer la sécurité alimentaire
A
Sikilo, village du sud-est du Sénégal, Gnilane Faye, bénéficiaire du Projet
d’appui à la sécurité alimentaire dans les régions de Louga, Matam et Kaffrine
(Pasa Loumakaf), se tient fièrement devant son poulailler. A ses côtés, son
fils Serigne Saliou Bâ surnommé « l’enfant du Pasa Loumakaf ». Elle
présente son cahier de gestion de l’exploitation et explique le début de ses
activités.
« J’ai
démarré l’activité avec 43 volailles. Grâce à l’accompagnement du Pasa Loumakaf
en formation technique et appui conseil, j’ai pu produire cinq fois plus de
poulets. Aujourd’hui, j’en ai vendu déjà 160. Au prix moyen de 6 dollars par
poulet, j’ai pu générer un revenu annuel de près de 1 000 dollars », raconte
Gnilane Faye. Des revenus qui lui ont permis de payer les frais de scolarité de
son fils et de diversifier ses activités : elle a investi dans le
maraîchage et a bénéficié d’un soutien financier du projet pour construire une
bergerie, qui abrite déjà huit chèvres.
Non
loin de là, dans le village de Nguetou Malick, Segnane Modou est, lui aussi,
propriétaire d’une bergerie financée par le Pasa Loumakaf. Cet appui lui a été
attribué pour promouvoir la filière ovine dans le cadre du programme national
d’autosuffisance en moutons de Tabaski. Coût de l’investissement :
5 300 dollars. « Au démarrage, je ne détenais que deux moutons, j’en ai
désormais 13. J’en ai vendu 3 pour faire face aux dépenses d’hospitalisation
(635 dollars) de mon père », raconte-t-il.
Le
Projet d’appui à la sécurité alimentaire au Sénégal, le Pasa Loumakaf a reçu 40
millions de dollars américains du Programme mondial pour l’agriculture et la
sécurité alimentaire. La Banque africaine de développement, qui agit comme
agence d’exécution du projet, a apporté un financement de 2,8 millions de
dollars sous la forme d’un prêt du Fonds africain de développement.
Lancé
en 2014, le projet vise à améliorer la sécurité alimentaire ainsi que les
revenus des producteurs et éleveurs ruraux au Sénégal. Il est axé sur le
développement des infrastructures agricoles et d’élevage, avec un accent
particulier sur la mobilisation de l’eau, l’appui à la mise en valeur, le
développement des chaînes de valeur et le renforcement des capacités des
bénéficiaires -agriculteurs, éleveurs et collectivités.
« Le
Pasa Loumakaf a ciblé Louga, Matam et Kaffrine en raison des caractéristiques
socio-économiques de ces régions : taux de pauvreté relativement élevé
(l’indice de pauvreté se situe entre 45% et 64%), malnutrition récurrente et
pluviométrie faible avec 300 à 350 mm par an », explique Moustapha
Diaw, coordonnateur du projet.
Vers une diversification agricole
Après
5 ans et demi de mise en œuvre, les changements sont perceptibles :
diversification agricole, accroissement des revenus, amélioration de la
production et de la productivité, désenclavement, sécurisation et
commercialisation des produits.
En
termes d’infrastructures agricoles, il a réalisé l’aménagement de 2 500
hectares de bas-fonds rizicoles, la construction de cinq centres de groupage,
l’aménagement d’une quarantaine de fermes totalisant 390 ha de périmètres
irrigués autour de 32 forages ainsi que de 60 ha de jardins maraîchers, la
construction de 26 bâtiments d’exploitation. Quelque 111 km de pistes rurales
et bretelles ont facilité l’accès aux marchés.
Dans
le département de Kaffrine, les bénéficiaires de la ferme Médina Temegne
exposent leurs produits : manioc, tomate, aubergine, patate douce à peau
orange, moringa et arachide. « Tous nos produits sont disponibles sur le
marché toute l’année grâce au forage. Nos 42 femmes adhérentes et jeunes, sont
formés et encadrés. Ils ne veulent plus quitter le village et la ferme »,
note le président du GIE Médina Temegne. Depuis 2017, la ferme a cumulé
33 000 dollars de recettes, dont plus de la moitié ont autofinancé des
campagnes de production, le reste étant partagé entre les populations
bénéficiaires.
Grâce
aux aménagements agricoles et à la maîtrise de l’eau, le projet a créé des
perspectives réelles de développement : la production est davantage
diversifiée (maraîchage, riziculture, etc.), l’exode rural a baissé (plus de
70% des agriculteurs installés dans les fermes sont des jeunes de 18 à 35
ans) et les femmes se sont reconverties dans les activités maraîchères,
délaissant la vente de charbon. Plus de 1 100 emplois ont été créés dans les
fermes, dont 40% au profit des femmes. En partenariat avec l’ACMU (Agence de la
couverture maladie universelle), le projet a aussi permis à 10 000
personnes d’adhérer à des mutuelles de santé grâce aux revenus générés par
l’activité agricole.
Par
ailleurs, le projet Pasa Loumakaf a aussi mis en place différentes infrastructures
pastorales (forages, mares, parcs de vaccination, bergeries, poulaillers,
étables) pour accroître la productivité du secteur de l’élevage.
Le
projet a soutenu 217 comités de gestion d’infrastructures hydro-agricoles et
formé quelque 17 000 agriculteurs, dont 10 000 femmes, et 36 000 éleveurs
à la maîtrise des techniques de production, transformation, gestion et
commercialisation.
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