La régénération naturelle gérée par les agriculteurs donne de bons résultats au Kenya
"On devrait toujours
demander aux gens ce qu'ils veulent, obtenir leur opinion et les impliquer.
C'est la seule façon pour eux de se sentir parties prenantes et d'aboutir
à un projet réussi ", déclare Ivan Kiptui, chargé de projet pour
World Vision dans le comté de Baringo, au Kenya.
Son
travail consiste à former les agriculteurs à la régénération naturelle,
une méthodologie qui les aide à gérer leurs terres de manière à préserver ou à
améliorer l'écosystème, en s'appuyant sur les connaissances indigènes et les
dernières approches adaptées au paysage.
Nancy
Kemboi, mère de cinq enfants, a été agricultrice toute sa vie. Elle
possède 17 vaches et 20 poulets et vit dans un paysage semi-aride.
Auparavant, elle avait l'habitude de couper tous les arbres présents sur
ses terres, sans se rendre compte de l'importance des arbres indigènes, et
attendait que l'herbe pousse d'elle-même pour que son bétail puisse
paître. La nourriture était suffisante jusqu'à ce que la saison sèche ne
frappe. Pour obtenir de l'argent pour acheter de l'herbe de fourrage,
elle devait se résoudre à détruire la forêt voisine afin de se
procurer du charbon de bois et du bois de chauffage et gagner rapidement de
l'argent.
Mais
depuis 2015, lorsque Nancy Kemboi a pris connaissance de l'importance de
la régénération naturelle gérée par les agriculteurs, elle a compris qu'avec
l'augmentation de la population et du nombre de bovins, il était urgent
d'adopter des pratiques agro-pastoralistes et de cultiver de
manière plus efficace et plus écologique.
Elle
fait maintenant pousser de l'herbe de fourrage et l'entrepose dans une
installation où l'humidité ne pénètre pas et ne fait pas pourrir
l'herbe. L'herbe de fourrage est conservée jusqu'à ce que la
sécheresse frappe, au moment où elle est nécessaire pour nourrir
le bétail. Nancy Kemboi ne coupe plus les arbres indigènes dans ses champs
car ils permettent à l'herbe de mieux pousser grâce à l'ombre et à la rétention
d'humidité qu'ils fournissent. Les arbres indigènes qu'elle a planté ont
tous un but spécifique : ils fournissent du fourrage pour son bétail (l'écorce
est très nutritive), du bois de chauffage, des médicaments, certains attirent
les abeilles et en général, ils sont résistants à la sécheresse et aux
termites. Elle pose leurs feuilles et leurs épines sur le sol pour couvrir
le sol qui deviendra ensuite de l'humus. Les arbres qui poussent
et qu'elle juge inutiles sont retirés et Nancy Kemboi s'en sert
afin de clôturer sa propriété. Ceux qu'elle décide de garder
sont taillés avec soin car si les arbres indigènes poussent plus
lentement que les espèces exotiques, une taille appropriée leur
permet de pousser plus rapidement. Elle essaie également de faire
revivre et de régénérer les arbustes et les arbres, ce qui est moins cher que
d'en planter de nouveaux.
Nancy Kemboi
a également aménagé des terrasses dans ses parcelles pour réduire l'érosion du
sol et retenir l'eau, et cultive de manière plus efficace, en
plantant des pommes de terre, des choux, des tomates et divers autres légumes
comme le maïs mais aussi des arbres fruitiers. Les arbres fruitiers
attirent les chauves-souris et les oiseaux et permettent d'augmenter la
biodiversité de l'écosystème.
Au
cours des quatre dernières années, Nancy Kemboi a été une
agricultrice modèle pour le système de régénération naturelle géré par les
agriculteurs et a formé dix autres agriculteurs. "Ma vie s'est
considérablement améliorée", affirme-t-elle. "Maintenant l'ai un
revenu diversifié, grâce à mes cultures de maïs, à mes légumes et à
l'apiculture, j'ai pu acheter une race de vaches
qui donne beaucoup plus de lait, ce qui me permet de gagner plus
d'argent".
Le
projet de régénération naturelle géré par les agriculteurs forme également les
jeunes en difficulté pour leur donner une chance de retourner à la terre.
"Ils pratiquent le consentement préalable, libre et éclairé, une série de
directives et de règles d'engagement des parties prenantes qui ont été
élaborées avec le soutien du ministère de l'Environnement et des Forêts dans le
cadre de l'appui ciblé du Programme ONU-REDD au Kenya par le biais du Programme
des Nations Unies pour le développement ", déclare Judy Ndichu,
coordinatrice technique du Forest Carbon Partnership Facility au Kenya.
"Elle donne aux communautés l'occasion de participer au processus de prise
de décision relatif aux projets concernant les forêts dont dépendent leurs
moyens de subsistance."
"En
plus de séquestrer du carbone, et donc de contribuer aux objectifs mondiaux
d'atténuation, la restauration des paysages améliore la sécurité alimentaire,
accroît la résilience et préserve la biodiversité. Si elle est appliquée à
grande échelle, les avantages perçus permettront à la fois d’améliorer la santé
des écosystèmes et entraîneront des niveaux plus élevés de développement
humains", explique Gabriel Labbate, chef de l'équipe mondiale du Programme
ONU-REDD.
David
Korrir, l'un des agriculteurs formé par Nancy Kemboi, déclare :
"Cette terre est mon or. J'investis dans l'agro-foresterie, en plantant
des légumes et différentes variétés d'arbres fruitiers comme les mangues et les
papayes afin de pouvoir récolter tout au long de l’année et ne jamais avoir
faim. Les générations futures profiteront de ma ferme et de ses arbres
indigènes qui ont permis aux oiseaux et aux abeilles de revenir."
Des
écosystèmes sains sont essentiels à la survie de l'humanité. L'atténuation et
l'adaptation au changement climatique, la sécurité alimentaire et de
l'approvisionnement en eau, la réduction de la pauvreté, la croissance
économique et la conservation de la biodiversité dépendent tous d'écosystèmes
florissants qui fonctionnent bien. Dirigée par le Salvador et rejointe par plus
de 70 pays de toutes les latitudes, l'Assemblée générale
des Nations Unies a proclamé 2021-2030 Décennie pour la restauration des
écosystèmes. Cette action positionne la restauration des écosystèmes comme
une solution majeure basée sur la nature pour répondre à un large éventail de
priorités nationales.
A.G.M
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