Haro sur le gaspillage alimentaire
Un
rapport publié le 29 août dernier esquisse de nombreuses pistes pour réduire
drastiquement les pertes et le gaspillage alimentaires, conformément à
plusieurs objectifs de développement durable et en réponse à l’urgence
climatique.
Comme
l'a montré le rapport
du GIEC (groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du
climat) rendu public le 08/08/19, une réduction drastique du gaspillage
alimentaire figure en bonne place des pistes à creuser pour limiter les
émissions de gaz à effet de serre liées à l'usage des sols à des fins
d'agriculture et d'élevage. D'après les chiffres publiés en 2011 par la FAO
(food and agriculture organization des Nations unies) et qui font toujours
autorité, c'est un tiers de la nourriture produite qui disparaît entre la ferme
et l'assiette, correspondant au quart de l'eau utilisée par l'agriculture dans
le monde.
Ces
pertes sont aujourd'hui responsables de 8% des émissions annuelles. Diviser par
deux les volumes de nourriture perdue ou gaspillée répond à l'un des points de
l'Objectif de développement durable (ODD) portant sur l'élaboration de modèles
de production et de consommation durables. C'est l'ODD numéro 12, sur les 17
objectifs (dont l'accès à une énergie propre et abordable pour tous, l'accès à
l'eau potable et à l'assainissement, l'égalité entre les sexes,l'élimination de
la faim et de la pauvreté....) élaborés en septembre 2015 par les Nations unies
et que tous les États membres doivent viser à l'horizon 2030.
Mais cela
favoriserait également l'atteinte d'autres objectifs portant sur l'élimination
de la faim et de la pauvreté extrême dans le monde, tout en ayant des effets
positifs sur la santé (moindre recours aux fertilisants et moindres émanations
de méthane), la baisse des émissions de CO2, la mobilisation de moindres
surfaces de terres dédiées à l'agriculture et l'élevage ...
Un marché de 940 milliards de dollars par an
En
effet, en réduisant ce gaspillage alimentaire de 50% d'ici à 2050, on pourrait
combler 20% des besoins supplémentaires en alimentation nécessaire pour
répondre à l'accroissement de la population mondiale entre 2010 et 2050,
économiser une superficie équivalente à l'Argentine et abaisser les émissions
de gaz à effet de serre de 1,5 gigatonne par an.
C'est
pourquoi le World Ressource Institue (WRI), associé notamment à la Banque
mondiale et au Programme des Nations unies pour l'Environnement (PNUE), publie
un agenda global destiné aussi bien aux entreprises, aux gouvernements, à la
société civile et à tous les acteurs de la chaîne d'approvisionnement
alimentaire.
Les volumes d'alimentation perdus équivalent aujourd'hui à une
valeur de 940 milliards de dollars par an, un marché qui aiguise l'appétit de
startups spécialisées et incitent également les grands groupes de
l'agro-alimentaire à améliorer leurs performances. 50% de la population
mondiale vit d'ores et déjà dans un pays qui, à l'instar de la France, s'est
fixé des objectifs en termes de réduction du gaspillage alimentaire. C'est
aussi le cas de 32 des 50 premiers groupes mondiaux de l'agro-alimentaire.
Avec le développement économique, le gaspillage remplace les pertes
En
fonction du degré de développement des pays concernés, c'est à différentes
étapes de cette chaîne que la nourriture disparaît, le gaspillage remplaçant
peu à peu les pertes. Les causes sont aussi bien technologiques, managériales
ou comportementales. Les pays moins développés subissent essentiellement des
pertes dans la phase de stockage liée à la mauvaise qualité des
infrastructures, aux variations saisonnières ainsi qu'à des prévisions
approximatives à la fois de l'offre et de la demande. Dans les économies plus
riches, où les normes sociales sont responsables du rejet des produits à
l'apparence non conforme, ce sont principalement les ménages et les restaurants
qui sont responsables du gaspillage. Les détériorations sur le lieu de
production frappent également dans tous les pays.
Certains
facteurs structurels sont globaux, notamment la croissance démographique, le
changement climatique, le manque de financement, des aberrations en termes de
réglementation...Et tous sont étroitement imbriqués les uns aux autres.
Rentabilité économique
Les
auteurs de l'étude préconisent à tous les acteurs (Etats, entreprises, société
civile, particuliers, et les différents maillons de la chaîne
d'approvisionnement) de se fixer des objectifs, de mesurer et piloter
l'avancement de leurs efforts, et surtout de passer à l'action, chacun dans le
contexte local qui est le sien. Ils insistent sur la nécessité de démontrer par
des cas d'école la rentabilité économique d'une réduction du gaspillage
alimentaire à leur niveau, prônent une collaboration accrue entre tous les
acteurs et mettent en garde contre le risque d'un effet domino provoqué par
certaines actions.
Ils
suggèrent de nombreuses actions pour chaque étape de la chaîne de production et
pour chaque catégorie d'acteurs, depuis les paysans jusqu'aux industriels de
l'agro-alimentaire en passant par les transporteurs, les pêcheurs, les
fabricants d'emballages, les abattoirs, les grossistes, la restauration
collective, les ménages, etc.
Produits financiers et fonds dédiés
Certaines
approches globales concernent l'intégralité de la chaîne de valeur, telles que
l'adoption par les États de stratégies nationales ou la multiplication de
partenariats entre les secteurs public et privé autour de cette cause.
Parmi
les approches ciblées figurent l'amélioration des solutions de stockage, une
évolution des normes sociales semblable à celle déjà à l'œuvre sur les déchets
et une priorité donnée aux secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre
(production bovine, de produits laitiers ou encore de riz).
Les
auteurs du rapport insistent également sur la nécessité d'accroître le
financement disponible grâce au développement de produits financiers et de
fonds dédiés, la collecte de nombreuses données et un accroissement de l'effort
de recherche.
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