Cultiver la résilience des communautés rurales en Guinée-Bissau
Il
y a plus de dix ans, dans la région de Tombali, le mari d'Arama Tudarame, qui
est aussi un dirigeant local, a cherché aux alentours de leur village des
terres propices à la culture d'anacardiers. À l'époque, comme aujourd'hui, la
monoculture de cette noix en forme de haricot dominait le secteur agricole du
pays. La noix de cajou est la source de revenu principale de la plupart des
agriculteurs de Guinée-Bissau, ceux-ci vendant leurs récoltes en échange de riz
importé.
Mais
ils ne trouvèrent que des basses plaines gorgées d'eau où les champs étaient
laissés à l'abandon: l'idéal pour cultiver leur propre riz. Dans les bas-fonds,
la riziculture est généralement gérée par de petites exploitantes agricoles.
"Nous savions que nous pouvions y cultiver du riz, mais nous n'avions pas
de machines", explique Amara, "nous devions tout faire à la main,
raison pour laquelle les terres n'étaient guère exploitées."
Depuis
2015, augmenter la production et la consommation de riz à l'échelle nationale
est devenu une priorité du gouvernement. En 2017, avec l'aide du Projet d'appui
au développement économique dans les régions du Sud (PADES)
du FIDA, la communauté s'est employée avec détermination à mobiliser sa
main-d'œuvre ainsi que ses ressources pour réhabiliter les aires concernées.
Mobilisation à l'échelle locale
L'un
des principaux facteurs de succès a été le développement d'un modèle de comité
de gestion, qui avait été mis en œuvre dans le cadre d'un précédent projet du
FIDA dans la région. En général, les comités sont composés de dix membres qui
représentent les femmes, les hommes et les jeunes de la communauté. Ces membres
choisis par une assemblée de pairs sont appelés à diriger les différents aspects
des interventions du projet. Les comités de gestion des bolanhas sont chargés
de gérer toutes les activités dans les rizières; dans la langue créole locale,
une rizière est appelée "bolanha".
Dirigé
par Amara, le comité local a entrepris une campagne de porte-à-porte pour
recruter des bénévoles et recueillir des contributions pour soutenir les
travaux d'assainissement.
Les familles ont été invitées à faire don d'un kilo de riz et de 100 francs, qui ont ensuite été utilisés pour acheter du poisson et de l'huile. "Les hommes ne cultivent pas beaucoup dans les bas-fonds, mais ils nous ont aidés à défricher la terre. Deux à trois fois par semaine, un groupe d'entre nous allait collecter des contributions de l'aube à la nuit et nous rassemblions des volontaires pour cuisiner pour tous ceux qui aidaient dans les champs."
©FIDA/Camila Caicedo |
Une
fois les activités initiales de défrichage et de nettoyage terminées, des
engins ont été utilisés pour construire de hautes digues afin d'améliorer la
rétention d'eau et d'éloigner les ravageurs. Auparavant, les rats étaient un
obstacle majeur à la productivité car ils mangeaient une partie importante des
récoltes annuelles. "2018 a été la première année où les animaux n'ont
plus envahi les champs et n'ont plus mangé notre riz; nous avons donc eu
beaucoup de surplus", se rappelle Amara.
La
communauté a également choisi six membres qui participeraient à une formation
de cinq jours dirigée par l'Institut national de recherche agricole (INPA).
Quatre femmes et deux hommes ont reçu une formation sur la méthode de repiquage
des semences en pépinière, sur les pratiques de parcellement des champs et sur
d'autres procédés destinés à accroître leurs rendements. Suite à cette
formation, ils ont été chargés de transmettre au reste de la communauté ce qu'ils
avaient appris.
L'organisation
de la division des rizières en parcelles de 25 mètres sur 25 a été un
changement important dès le début du projet. Jusqu'alors, le fonds commun
reposait sur un système d'emprunt informel. Aujourd'hui, on passe par une documentation
écrite et chaque personne qui possède ou est responsable d'une bolanha s'engage
à verser 1 000 francs sur un fonds commun. Ce fonds, géré par le comité, sert à
couvrir les situations d'urgences ou les frais qui ont des répercussions pour
tous les agriculteurs qui sont majoritairement des femmes. Précédemment, les
fonds ont été utilisés pour louer des machines afin de creuser des digues et,
donc, faciliter la plantation.
©FIDA/Camila Caicedo |
Au
total, 23 hectares de basses plaines ont été assainis pour améliorer la
riziculture avec l'aide du PADES. Par ailleurs, les membres de la communauté
ont profité de l'amélioration de la qualité du sol et du système de gestion de
l'eau pour commencer à lancer d'autres cultures telles que la patate douce. Les
activités complémentaires, en dehors de la saison de la riziculture,
contribuent à diversifier les régimes alimentaires, à augmenter les revenus et
à renforcer la résilience face aux chocs économiques et climatiques liés à la
monoculture.
Entre-temps,
le modèle de comité offre une approche durable et viable des activités de
développement communautaire. Quant à l'avenir, explique Amara, l'augmentation
de l'horticulture et l'extension des cours d'alphabétisation proposés aux
femmes sont deux initiatives que le comité actuel envisage pour continuer à
consolider les avantages des interventions du projet. "Ce que nous
apprenons, nous ne l'oublierons pas. Nous utilisons ces connaissances jour
après jour."
Source
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire