Un regroupement d’organisations de la société civile
dénonce, dans cette déclaration parvenue à Fasozine, le lâcher de moustiques
génétiquement modifiés le lundi 1er juillet 2019 au dans la localité de Bana, à
Bobo-Dioulasso.
«Nous, soussignés, organismes de la société civile
d'Afrique et du monde, dénonçons le lâcher de moustiques «mâles-stériles» génétiquement
modifiés (GM) au Burkina Faso. Les moustiques GM ont été relâchés dans
le village de Bana, le 1er juillet 2019 par le consortium de recherche Target
Malaria.
Ce lâcher dans l’environnement a pour vocation de
tester l'infrastructure et les systèmes en place en vue de futurs lâchers, qui
à ce jour demeurent de nature expérimentale, et incluent notamment des
moustiques issus du « forçage génétique ». L'objectif ultime de Target Malaria
est de disséminer volontairement des moustiques issus du « forçage génétique»,
dans le but de réduire la population de moustiques Anophèles gambiae, qui
peuvent transmettre le parasite vecteur du paludisme. Les promoteurs du projet
affirment qu'une réduction de la population de moustiques contribuera à réduire
le risque de transmission du paludisme et par conséquent d'incidence de la
maladie.
Le lâcher de moustiques GM au sein du village est
une expérience qui va à l’encontre de l’éthique, dans la mesure où Target
Malaria reconnaît que ce lâcher de moustiques GM n’apportera aucun bénéfice
direct à la population locale en termes de lutte antipaludique. Il ne s'agit
pas d'une première étape d’essais avec les moustiques GM qui seraient
ultérieurement testés pour leur impact sur le paludisme, mais d’une
dissémination de moustiques GM entièrement différents.
Il n'y a par conséquent aucune justification pour
ces lâchers. Selon la Déclaration d’Helsinki de l'association médicale
mondiale, qui est basée sur le code de Nuremberg et qui décrit les principes
moraux internationalement reconnus guidant la recherche médicale impliquant des
sujets humains, de telles recherches ne « peuvent être résalis(ées) que si
l’importance de l’objectif recherché prévaut sur les contraintes et les risques
encourus par le sujet ». (Article 16).
En lieu et place, ce lâcher de moustiques GM pose
des risques, y compris le risque accidentel que des femelles moustiques GM
capables de piquer soient accidentellement relâchées au cours des expériences.
Bien que Target Malaria affirme que ce nombre sera limité, étant donné que les
moustiques femelles GM peuvent piquer les humains et diffuser le paludisme, la
mise en circulation des femelles pose toujours un certain risque aux
populations locales.
ii
L'article 26 de la déclaration d’Helsinki exige
également que les participants des recherches soient adéquatement informés des
risques et des avantages anticipés par l'étude, en tant qu'élément du processus
de consentement éclairé. De manière regrettable, en dépit des affirmations de
Target Malaria selon lesquelles ses activités de projet font l’objet d’une «
acceptation par la communauté », tout porte à penser le contraire. Les
témoignages de certains villageois dans les zones où Target Malaria opère
indiquent qu'ils n'ont pas été correctement informés quant au projet ou à ses
risques potentiels.
Aucune publication d'une évaluation des risques
environnementaux (ERE) n'est disponible, autre que celle publiée par Target
Malaria et aucune consultation publique n'a eu lieu, indépendamment des
activités « de consultation publique » conduites par Target Malaria
(l'organisation proposant les lâchers). L'absence d’une étude de risques
environnementaux complète, qui aurait dû faire l’objet d’un processus de
consultation publique ouvert et transparent, fait qu’il est impossible de
mettre en application les conditions d’un consentement pleinement éclairé,
parce que les locaux ne peuvent pas être pleinement informés sur les risques
encourus avant de prendre une décision quant à leur acceptation.
Les lâchers au Burkina Faso sont les premiers
lâchers ouverts de moustiques GM en Afrique. Les lâchers précédents de
différents moustiques GM dans d'autres régions du monde ont été ponctués échecs,
de déclarations mensongères, d'une absence d'évaluation adéquate des risques,
et d’un mépris des règlements internationaux et locaux.
Nous sommes profondément mécontents que, encore une
fois, l'Afrique soit de nouveau devenue un terrain d’essai pour des
technologies risquées.
De plus, ce lâcher de moustiques GM est considéré
comme une première étape pour préparer le terrain à de futurs lâchers possibles
de moustiques issus du forçage génétique. Il est totalement inacceptable de
mener des expériences sur des vies africaines pour préparer le terrain pour
cette technologie non vérifiée et extrêmement controversée, envers laquelle des
scientifiques indépendants ont exprimé d’importantes inquiétudes et contre
laquelle plus de 170 organismes de la société civile ont réclamé un moratoire.»
Source: fasozine.com
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