L’énergie hydraulique en Afrique subsaharienne
Avec environ 35% de la population qui avait accès à l’électricité en 2000, l’Afrique présente les taux d’électrification les plus faibles du monde en voie de développement. Pourtant ce continent regorge d’immenses potentialités pour produire l’électricité nécessaire à son émergence économique. Une des richesses dont il dispose est son potentiel hydroélectrique qui représente environ 10% du potentiel hydroélectrique mondial. En guise de comparaison, ce potentiel correspond à la consommation énergétique (pas uniquement électrique) annuelle de la France, l’Allemagne, la Grande Bretagne et l’Italie réunies. Au-delà du fait que la République Démocratique du Congo (110 000MW) à elle seule, concentre environ 50% de ce potentiel, toutes les régions d’Afrique subsaharienne sont dotées d’atouts leur permettant de développer des installations hydroélectriques.
Ainsi l’Afrique de l’Ouest, qui abrite
un quart des cours d’eau du continent, dispose d’un potentiel de 25 000
MW dont environ le quart se trouve en Guinée. En 2007, seulement 16% de
ce potentiel était exploité mais plusieurs projets de développement de
barrages hydroélectriques actuellement en cours permettront d’augmenter
ce taux. Ce sont entre autres, les barrages de Soubré en Côte d’Ivoire
(270 MW), de Bui au Ghana (400 MW), de Kaléta (240 MW) et de Koukoutamba
(280 MW) en Guinée.
L’Afrique Centrale est la région de tous
les paradoxes. En effet le taux d’électrification de cette région est
de 13,4% alors que la région, avec la RDC et le Cameroun, est celle qui
possède le plus important potentiel hydroélectrique de l’Afrique
(environ 60% de l’ensemble du potentiel). Même si des projets tels que
le barrage de Lom Pangar au Cameroun permettront de réduire ce
contraste, il est important de souligner le retard accusé par cette
région dans l’exploitation de ses immenses potentialités.
L’Ethiopie en Afrique de l’Est est le
deuxième pays en Afrique, après la RDC, en termes de potentiel
hydroélectrique (40 000 MW). Ce pays, drainé par le Nil, voit se
développer de nombreux projets de barrages dont celui de la
« Renaissance », qui produira à terme 5 250 MW. Doté d’une puissance
hydroélectrique d’environ 728 MW en 2009, le pays se posera, avec ses
différentes installations (Gigel Gibe II et III, Takeze, Anabeles, etc…)
en construction (ou déjà mises en service), en exportateur
d’électricité vers les autres pays de la région tels que le Kenya,
Djibouti et le Soudan.
De ce rapide tour d’horizon, il est
essentiel de retenir que malgré tous ces atouts, seulement 4% du
potentiel exploitable est exploité et 45% de l’électricité produite sur
le continent est d’origine hydroélectrique. Ce qui est insuffisant.
A l’insuffisance des capacités
hydroélectriques installées, s’ajoute un déficit d’entretien des
installations existantes. Ce qui pénalise le développement économique et
humain de l’Afrique subsaharienne. Le cas du Grand Inga en RDC illustre
parfaitement cette perfide combinaison. Le complexe de Grand Inga à lui
seul a un potentiel hydroélectrique de l’ordre de 44 000 MW, une
puissance deux fois supérieure à celle du complexe hydraulique des
Trois-Gorges en Chine et qui pourrait couvrir 40% des besoins de toute
l’Afrique. Le premier élément de la perfide combinaison réside dans le
fait que sur la quinzaine de barrages prévus au départ, seuls deux (Inga
I et Inga II) ont été réalisés en 1972 et 1982 pour une capacité
théorique de 1 800 MW. L’idée que depuis trente ans, rien de nouveau n’a
été construit pour accroitre les capacités de production sur ce site
plus que prometteur est tout simplement révoltante. La réalisation de ce
genre de projets devrait remplacer la volonté de se maintenir au
pouvoir à tout prix dans la liste des priorités de nos gouvernants.
De plus, faute de moyens pour les
entretenir convenablement, les deux barrages ne produisaient en octobre
2008 que 875 MW. Ceci uniquement parce que la moitié des groupes de Inga
I et Inga II étaient en activité. Visiblement, dans un pays de la
taille de la RDC, avec les ressources dont il regorge, les dirigeants
estiment qu’il est normal que les citoyens subissent les aléas du
rationnement faute de moyens pour réparer ces machines.
Ce sous-équipement et ce déficit
d’entretien doivent amener les gouvernants africains à investir
massivement dans le développement des compétences afin de mieux
exploiter ses immenses potentialités. Faute de quoi, vu l’importance
capitale que ce genre de projets revêt, l’idée que leur réalisation soit
pilotée par des structures spécialisées supra nationales doit être
examinée avec attention.
Publié par Stéphane Madou
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