La production de combustibles fossiles doit diminuer de 6% par an pour limiter le réchauffement de la planète (PNUE)
Les pays prévoient d'augmenter leur production de combustibles
fossiles au cours de la prochaine décennie alors que les recherches
indiquent que le monde doit diminuer cette production de 6% par an afin de
limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius, selon un nouveau
rapport publié mercredi par l’agence onusienne pour l’environnement.
« Les gouvernements doivent saisir l'occasion d’éloigner leurs
économies et leurs systèmes énergétiques des combustibles fossiles et de
reconstruire en mieux pour un avenir plus juste, plus durable et plus résistant
aux chocs futurs », a déclaré la Directrice exécutive du Programme des Nations
Unies pour l'environnement (PNUE), Inger Andersen.
Le rapport mesure l’écart entre les objectifs de l’Accord
de Paris sur le climat et la production de charbon, de pétrole et de gaz prévue
par les pays.
Selon le PNUE, « le déficit de réduction de la production »
reste important : les pays prévoient de produire en 2030 une quantité de
combustibles fossiles plus de deux fois supérieure à celle qui serait
compatible avec une limite de la hausse des températures à 1,5 degré Celsius.
« Les feux de forêt, les inondations, les sécheresses et les
autres phénomènes météorologiques extrêmes dévastateurs de cette année nous
rappellent avec force les raisons pour lesquelles nous devons réussir à lutter
contre la crise climatique », a ajouté Mme Andersen.
Le rapport examine les implications de la pandémie de
Covid-19 et des mesures de relance et de relèvement prises par les
gouvernements en ce qui concerne la production de charbon, de pétrole et de
gaz.
L’étude invite à investir dans les énergies et les
infrastructures à faible teneur en carbone, soulignant que cela sera bon pour
l'emploi, pour les économies, pour la santé et pour l'air pur au moment de
relancer les économies à la suite de la pandémie de Covid-19.
Un tournant potentiel
Le rapport de cette année est publié à un moment qui marque un
tournant potentiel, alors que la pandémie suscite une action gouvernementale
sans précédent et que les principales économies, dont la Chine, le Japon et la
Corée du Sud, se sont engagées à atteindre zéro émission nette de gaz à effet
de serre.
Selon les auteurs du rapport, les recherches montrent «
clairement » que « nous sommes confrontés à de graves perturbations climatiques
si les pays continuent à produire des combustibles fossiles aux niveaux
actuels, sans parler de leurs augmentations prévues ».
« La recherche est tout aussi claire sur les solutions à
adopter : des politiques gouvernementales qui réduisent à la fois la demande et
l’offre de combustibles fossiles et soutiennent les communautés qui en
dépendent actuellement », affirme l'un des principaux auteurs du rapport,
Michael Lazarus. Il souligne que le rapport propose des mesures que les
gouvernements peuvent prendre dès aujourd'hui « pour une transition juste et
équitable vers l’abandon des combustibles fossiles ».
Les principales conclusions du rapport sont les suivantes :
- Pour suivre la
trajectoire d’un réchauffement limité à 1,5 °C, le monde devra réduire la
production de combustibles fossiles d’environ 6% par an entre 2020 et
2030. Les pays planifient et prévoient plutôt une augmentation annuelle
moyenne de 2%, ce qui, d’ici 2030, se traduirait par une production plus
de deux fois supérieure à la limite de 1,5 °C.
- Entre 2020 et 2030,
la production mondiale de charbon, de pétrole et de gaz devrait diminuer
de 11%, 4% et 3% par an, respectivement, pour être conforme à la
trajectoire de 1,5 °C.
- La pandémie de
Covid-19 et les mesures de confinement pour enrayer sa propagation ont
entraîné une baisse à court terme de la production de charbon, de pétrole
et de gaz en 2020. Mais les plans pré-Covid et les mesures de relance
post-Covid indiquent que l’écart entre les besoins et les
perspectives en matière de réduction de la production de combustibles
fossiles dans le monde continue de se creuser, ce qui risque de perturber
gravement le climat.
- À ce jour, les
gouvernements du G20 ont engagé plus de 230 milliards de dollars dans
le cadre de mesures de réponse à la Covid-19 en faveur des secteurs
responsables de la production et de la consommation de combustibles
fossiles, soit bien plus que pour l'énergie propre (environ 150 milliards
de dollars). Les décideurs politiques doivent inverser cette tendance pour
atteindre les objectifs climatiques.
Diversification économique et transition vers une énergie
propre
« Le choc de la demande dû à la pandémie et à la chute des
prix du pétrole cette année ont une fois de plus démontré la vulnérabilité des
nombreuses régions et communautés qui dépendent des combustibles fossiles », a
ajouté l'auteure principal du rapport, Ivetta Gerasimchuk.
Selon l’experte, la seule façon de sortir de ce piège est de «
diversifier ces économies et de dépasser les combustibles fossiles ». Or « de
nombreux gouvernements ont multiplié leur consommation de combustibles fossiles
par deux et renforcé ainsi ces vulnérabilités », signale-t-elle.
Elle prône plutôt l’orientation des fonds de relance vers la
diversification économique et de les canaliser pour une transition vers une
énergie propre qui offre un meilleur potentiel économique et d'emplois à long
terme.
« C'est peut-être l'une des entreprises les plus difficiles du
XXIe siècle, mais elle est nécessaire et réalisable », a affirmé Mme
Gerasimchuk.
![]() |
Une réduction équitable des combustibles fossiles
Le rapport examine également comment le monde peut
s’affranchir des combustibles fossiles de manière équitable, la réduction
progressive la plus rapide étant nécessaire dans les pays ayant une capacité
financière et institutionnelle plus élevée et étant moins dépendants de la
production de combustibles fossiles.
Certains des plus grands producteurs de combustibles fossiles
de ce groupe de pays, comme l’Australie, le Canada et les États-Unis, sont
actuellement les pays qui cherchent à accroître considérablement leur
approvisionnement en combustibles fossiles.
Les pays qui dépendent fortement des combustibles fossiles et
dont les capacités sont limitées auront besoin d'un soutien international pour
assurer une transition équitable. Le rapport explore les moyens de faciliter
cette coopération.
« La réduction de la production de combustibles fossiles à un
rythme conforme aux objectifs de Paris nécessite à la fois une coopération et
un soutien international », déclare Cleo Verkuijl, autre auteure
principale du rapport.
« Alors que les pays communiquent des engagements climatiques
plus ambitieux dans le cadre du processus des Nations Unies sur le climat en
prévision de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique de
2021 à Glasgow, ils ont la possibilité d'intégrer dans ces plans, ou CDN, des
objectifs et des mesures visant à réduire la production de combustibles
fossiles », ajoute Mme Verkuijl.
Six domaines d'action pour réduire les combustibles fossiles
Le rapport énumère six domaines d'action, offrant aux
décideurs politiques des solutions pour commencer à réduire progressivement les
combustibles fossiles à mesure qu'ils mettent en œuvre les plans de relance à
la suite de la Covid-19, tels que : réduire les aides publiques existantes en
faveur des combustibles fossiles, introduire des restrictions à la production
et veiller à ce que les fonds de relance soient affectés à des investissements
verts (tout en assortissant toute aide à forte teneur en carbone de conditions
favorisant l'alignement à long terme sur les objectifs climatiques).
Le rapport met en lumière l'action des gouvernements qui
risque de nous enfermer dans des filières d'énergie fossile et offre des
solutions et des exemples pour dépasser la production de charbon, de pétrole et
de gaz.
Le rapport est le fruit des efforts conjoints de l'Institut de
l'environnement de Stockholm (SEI) ; de l'Institut international du
développement durable (IISD); de l’Overseas development Institute (ODI), de
l’E3G, du PNUE, ainsi que de dizaines de chercheurs qui ont contribué à
l'analyse et à l’examen, en provenance de nombreuses universités et d'autres
organismes de recherche.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire