Les camions à hydrogène, prochaine grande révolution du transport ?
Le
développement des véhicules à hydrogène passera par les camions: c'est le pari
de nombreux constructeurs dont Hyundai, qui livre mercredi ses premiers poids
lourds à l'hydrogène.
La marque
coréenne Hyundai a loué à des transporteurs suisses sept"XCient Fuel
Cell", de camions de
36 tonnes capables de parcourir 400 kilomètres à pleine charge, avec un
réservoir de 32 kilos. L'hydrogène y
est transformé via une pile, alimentant un moteur électrique qui ne rejette que
de la vapeur d'eau.
Alors que
le marché des voitures particulières à hydrogène reste balbutiant, faute
d'infrastructures de production et de distribution du gaz, les camions
pourraient ouvrir la route. "La demande de camions est bien plus forte: ça
aidera à construire les infrastructures", a souligné Mark Freymüller, le
patron de l'opération de Hyundai en Suisse, lors de la présentation du camion à
la presse.
Pour le
patron de Michelin Florent Menegaux, "c'est la prochaine grande révolution
du transport". Le géant français du pneu a misé dessus en lançant Symbio,
une coentreprise de piles à combustibles avec l'équipementier Faurecia.
La pile à
combustible, qui offre une forte puissance motrice et un fonctionnement
silencieux, est prometteuse pour les poids-lourds: les chauffeurs ont
généralement des trajets prévus à l'avance, facilitant l'installation de
stations devant leur entrepôt ou sur leur parcours.
L'impatience
des investisseurs a permis à la startup américaine Nikola, qui promet de lancer
un camion à hydrogène, d'enchaîner les records en bourse avant même de
présenter un camion qui roule réellement...
La
démission fracassante de son président et fondateur Trevor Milton, accusé à la
fois d'avoir trompé son monde, et d'avoir commis des agressions sexuelles, a
depuis jeté une ombre sur les grandes ambitions de Nikola. Associée aux géants
GM, Iveco et Bosch, la startup prévoit de lancer des utilitaires électriques
avant de tester ses premiers poids lourds à hydrogène en 2022.
Hyundai,
qui a refusé de s'associer à Nikola, explique de son côté que ses ingénieurs
perfectionnent leurs moteurs à hydrogène depuis vingt ans, et prévoit d'y
investir plus de 6 milliards de dollars d'ici 2025.
La marque
a choisi la Suisse pour lancer ses camions parce que le diesel y
est cher et que la géographie du pays convient à l'usage du camion.
Hyundai
compte produire 2000 Xcient par an à partir de 2021, et se développer en
Allemagne dès 2021, puis en Autriche, aux Pays-Bas et en Norvège. Le Xcient
promet une autonomie de 1000 kilomètres à horizon 2030, avec un passage à la
pompe d'une quinzaine de minutes.
Hyundai
vise également les Etats-Unis et la Chine qui compte mettre sur ses routes un
million de véhicules équipés d'ici 2030.
Toyota, Daimler et Volvo fourbissent leurs armes
Une autre
marque pionnière, Toyota, développe un poids lourd à l'hydrogène pour le marché
nord-américain et un autre pour le marché japonais. Daimler et Volvo se sont
aussi associés dans le domaine.
Mardi,
l'équipementier français Faurecia a inauguré de son côté un "centre
d'expertise mondial" en France, près duquel seront produits à partir de
2023 des réservoirs pour le Hyundai Xcient. Ils se doivent d'être extrêmement
résistants, avec ce gaz inodore et très inflammable.
Le
constructeur néerlandais VDL développe également un modèle à hydrogène avec des
réservoirs de l'équipementier Plastic Omnium, dans le cadre d'un consortium
subventionné par l'Union Européenne, "H2HAUL".
"Nous
nous attendons à ce que les entreprises de logistique s'intéressent à ce
domaine", souligne Xavier Chollet, gérant du fonds Pictet Clean Energy
surtout s'il devient moins cher de faire un plein à l'hydrogène qu'au diesel.
Il ne prévoit pas de "conquête massive du marché avant au moins
2030", "mais des innovations technologiques pourraient nous
surprendre".
Reste un
problème de taille: la production d'hydrogène est aujourd'hui fortement
émettrice de CO2,
car elle résulte essentiellement du reformage de méthane.
L’Union
européenne a fait de l'hydrogène propre, issu de l'électrolyse de l'eau, une de
ses priorités dans la course vers la neutralité climatique en 2050.
L’Allemagne
va y consacrer 9 milliards d'euros, avec pour ambition de devenir le N°1
mondial, et la France 7 milliards d'euros, notamment à destination du transport
routier.
© 2020
AFP
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