Le changement climatique ne s’est pas arrêté pour la COVID-19, selon le rapport United in science
New
York/Genève – Le changement climatique ne s’est pas
arrêté pour la COVID-19. Les concentrations de gaz à effet de serre dans
l’atmosphère atteignent des niveaux records et continuent à augmenter. Après un
déclin temporaire dû au confinement et au ralentissement de l’activité
économique, les émissions repartent en direction de leur niveau d’avant la
pandémie. Le monde est en passe de connaître ses cinq années les plus chaudes
jamais enregistrées – une tendance qui va probablement se
poursuivre – et n’est pas sur la bonne voie pour atteindre l’objectif
convenu de maintenir l’élévation de la température moyenne de la planète
nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels ou de
limiter la hausse à 1,5 °C.
C’est ce
qui ressort d’un nouveau rapport interorganisations intitulé United
in Science 2020 qui émane d’organisations scientifiques de premier
plan. Ce rapport met en évidence les effets croissants et irréversibles du
changement climatique, qui touchent les glaciers, l’océan, la nature, les
économies et les conditions de vie et se manifestent souvent à travers des
aléas hydrologiques tels que les sécheresses ou les inondations. Il démontre
aussi comment la COVID-19 a entravé notre capacité à surveiller ces changements
dans le cadre du système mondial d’observation.
«C’est
une année sans précédent, tant pour l’homme que pour la planète. La pandémie de
COVID-19 a bouleversé les vies dans le monde entier. Pendant ce temps, le
réchauffement de notre planète et le dérèglement du climat se poursuivent», a
déclaré le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, António
Guterres, dans un avant- propos.
«La
nécessité d’une transition nette, inclusive et à long terme pour lutter contre
la crise climatique et parvenir à un développement durable n’est jamais apparue
aussi clairement. Nous devons tirer parti de la reprise après la pandémie pour
en faire une réelle opportunité de construire un avenir meilleur», a déclaré M.
Guterres, qui présentera le rapport le 9 septembre. «Nous avons besoin de la
science, nous avons besoin de solidarité et nous avons besoin de solutions».
Le
rapport United in Science 2020, deuxième de la série, auquel ont contribué
le Projet mondial sur le carbone, le Groupe d’experts intergouvernemental sur
l’évolution du climat, la Commission océanographique intergouvernementale de
l’UNESCO, le Programme des Nations Unies pour l’environnement et le Met Office
du Royaume-Uni, est coordonné par l’Organisation météorologique mondiale (OMM).
Il présente les données et les conclusions scientifiques relatives au
changement climatique les plus récentes en vue d’étayer les politiques et les
actions menées à l’échelle mondiale.
«Les
concentrations de gaz à effet de serre – qui n’ont jamais été aussi
élevées depuis 3 millions d’années – ont continué à augmenter. De
vastes étendues de la Sibérie ont connu une vague de chaleur prolongée et
exceptionnelle au cours du premier semestre 2020, ce qui aurait été très
improbable sans un changement climatique d’origine anthropique. Et la période
2016–2020 est en passe de devenir la période de cinq ans la plus chaude jamais
enregistrée. Ce rapport montre que si de nombreux aspects de notre vie ont été
bouleversés en 2020, le changement climatique quant à lui s’est poursuivi sans
relâche», a déclaré le Secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas.
PRINCIPALES CONCLUSIONS
Concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère (Organisation météorologique mondiale)
Les
concentrations atmosphériques de CO2 n’ont montré aucun signe de
plafonnement et ont continué à augmenter pour atteindre de nouveaux records.
Les stations de référence du réseau de la Veille de l’atmosphère globale (VAG)
de l’OMM ont signalé des concentrations de CO2 supérieures à 410 parties
par million (ppm) au cours du premier semestre 2020, Mauna Loa (Hawaï) et Cape
Grim (Tasmanie) enregistrant respectivement 414,38 ppm et 410,04 ppm en juillet
2020, contre 411,74 ppm et 407,83 ppm en juillet 2019.
La
réduction des émissions de CO2 en 2020 n’aura qu’une faible incidence sur
le taux d’augmentation des concentrations atmosphériques, qui sont le résultat
des émissions passées et actuelles et de la très longue durée de vie du CO2.
Pour stabiliser le changement climatique, il faut réduire durablement les
émissions jusqu’à ramener les émissions nettes à zéro.
Émissions mondiales de CO2 dues aux combustibles fossiles (Projet mondial sur le carbone)
On estime
que les émissions de CO2 diminueront de 4 à 7 % en 2020 grâce aux politiques
de confinement liées à la COVID-19. L’ampleur exacte du déclin dépendra de
l’évolution de la pandémie et des mesures prises par les gouvernements pour y
faire face.
Lors du
strict confinement au début du mois d’avril 2020, les émissions quotidiennes
mondiales de CO2 dues aux combustibles fossiles ont chuté de 17 % par
rapport à 2019, ce qui est sans précédent. Malgré cela, les émissions sont
restées équivalentes aux niveaux de 2006, ce qui souligne à la fois la forte
croissance qu’elles ont connue ces
15 dernières années et le fait que l’on continue à dépendre des sources d’énergie fossiles.
15 dernières années et le fait que l’on continue à dépendre des sources d’énergie fossiles.
Au début
du mois de juin 2020, les émissions quotidiennes mondiales de CO2 dues aux
combustibles fossiles étaient pratiquement revenues à leurs niveaux de 2019, se
situant à 5 % environ (fourchette de 1 à 8 %) en dessous des valeurs
enregistrées cette année-là, lesquelles avaient atteint un nouveau record de
36,7 gigatonnes (Gt), soit une augmentation de 62 % par rapport à leur niveau
au début des négociations sur le changement climatique en 1990.
Les
émissions mondiales de méthane provenant des activités humaines ont continué à
augmenter au cours de la dernière décennie. Les émissions actuelles de
CO2 et de méthane ne sont pas compatibles avec le profil d’évolution des
émissions qui permettrait d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.
Écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions (Programme des Nations Unies pour l’environnement)
On ne
peut plus remettre à plus tard les profonds changements à apporter si l’on
veut atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.
Le
Rapport 2019 sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de
réduction des émissions a montré qu’il faudrait réduire les émissions mondiales
de près de 3 %
par an entre 2020 et 2030 pour atteindre un objectif de 2 °C et de plus de 7 % par an en moyenne pour atteindre l’objectif de 1,5 °C de l’Accord de Paris.
par an entre 2020 et 2030 pour atteindre un objectif de 2 °C et de plus de 7 % par an en moyenne pour atteindre l’objectif de 1,5 °C de l’Accord de Paris.
L’écart
entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions en
2030 est estimé à 12-15 gigatonnes d’équivalent CO2 (GtéqCO2) pour limiter
le réchauffement climatique à moins de 2 °C. Pour l’objectif de 1,5 °C, l’écart
est estimé à 29-32 GtéqCO2, ce qui équivaut approximativement aux émissions
combinées des
six plus
grands émetteurs.
Il est
encore possible de combler l’écart, mais pour cela il faut une action urgente
et concertée de tous les pays et dans tous les secteurs. À court terme, on peut
déjà faire un grand pas en ce sens en renforçant les politiques existantes qui
ont fait leurs preuves, par exemple en matière d’énergies renouvelables et
d’efficacité énergétique, en utilisant des moyens de transport sobres en
carbone et en abandonnant progressivement le charbon.
Au-delà
de l’horizon 2030, de nouvelles solutions technologiques et un changement
graduel des modes de consommation sont nécessaires à tous les niveaux. Des
solutions réalistes tant sur le plan technique que sur le plan économique
existent déjà.
État du climat mondial (OMM et Met Office du Royaume-Uni)
La
température moyenne à l’échelle du globe de la période 2016–2020 devrait être
la plus élevée jamais enregistrée, soit environ 1,1 °C supérieure aux valeurs
de 1850–1900, période de référence pour l’évolution des températures depuis
l’époque préindustrielle, et 0,24 °C supérieure à la température moyenne
mondiale de la période 2011–2015.
Au cours
de la période quinquennale de 2020–2024, la probabilité que la
température moyenne d’au moins une année dépasse de 1,5 °C les niveaux
préindustriels est de
24 %, avec une très faible probabilité (3 %) que la moyenne quinquennale dépasse cette valeur. Il est probable (probabilité de 70 % environ) que les températures d’un ou de plusieurs mois au cours des cinq prochaines années dépassent d’au moins 1,5 °C les niveaux préindustriels.
24 %, avec une très faible probabilité (3 %) que la moyenne quinquennale dépasse cette valeur. Il est probable (probabilité de 70 % environ) que les températures d’un ou de plusieurs mois au cours des cinq prochaines années dépassent d’au moins 1,5 °C les niveaux préindustriels.
Entre
2016 et 2020, l’étendue de la banquise arctique a été chaque année inférieure à
la moyenne. La période 2016–2019 a enregistré une perte de masse glaciaire plus
importante que toutes les autres périodes quinquennales depuis 1950. La vitesse
d’élévation du niveau moyen de la mer à l’échelle du globe a augmenté entre
2011–2015 et 2016–2020.
Les
phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes ont eu de graves
répercussions. L’empreinte du changement climatique d’origine anthropique
ressort clairement pour un grand nombre d’entre eux.
L’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat)
Le
changement climatique dû aux activités humaines a une incidence sur toute la
biosphère, du sommet des montagnes aux profondeurs de l’océan, aboutissant à
une accélération de l’élévation du niveau de la mer, avec des effets en cascade
pour les écosystèmes et la sécurité des personnes.
Cela rend
de plus en plus difficiles les mesures d’adaptation et de gestion intégrée des
risques.
La masse
des calottes glaciaires et des glaciers a diminué dans le monde entier. Entre
1979 et 2018, l’étendue de la banquise arctique a diminué, et ce pour tous les
mois de l’année. L’augmentation des feux de forêt, le dégel abrupt du
pergélisol et la modification de l’hydrologie de l’Arctique et des zones
montagneuses ont changé la fréquence et l’intensité des perturbations subies
par les écosystèmes.
L’océan
n’a pas cessé de se réchauffer depuis 1970 et a absorbé plus de 90 % de
l’excédent de chaleur accumulé dans le système climatique. Depuis 1993, la
vitesse du réchauffement de l’océan, et donc son absorption de chaleur, a plus
que doublé. Les vagues de chaleur marines ont doublé en fréquence et sont
devenues plus longues, plus intenses et affectent des surfaces plus étendues,
entraînant des phénomènes de blanchissement des coraux à grande échelle.
L’océan a absorbé 20 à 30 % des émissions anthropiques totales de
CO2 depuis les années 1980, ce qui a accentué son acidification.
Depuis
1950 environ, l’aire de répartition géographique et les activités saisonnières
de nombreuses espèces marines ont changé en réaction au réchauffement de
l’océan, aux changements de la glace de mer et à la perte d’oxygène.
Le niveau
moyen de la mer s’élève à l’échelle planétaire avec une accélération au cours
des dernières décennies en raison d’une perte croissante de glace des calottes
glaciaires du Groenland et de l’Antarctique, en plus de la perte continue de
masse des glaciers et de la dilatation thermique de l’océan. Le rythme
d’élévation du niveau moyen de la mer entre 2006 et 2015, soit 3,6 ±0,5 mm/an,
est sans précédent au cours du siècle dernier.
Climat et ressources en eau (OMM)
Les
effets du changement climatique se font surtout sentir à travers la
modification des conditions hydrologiques, notamment au niveau de la dynamique
de la neige et de la glace.
D’ici à
2050, le nombre de personnes menacées par les inondations passera de
1,2 milliard à 1,6 milliard. Au début et jusqu’au milieu des années 2010, 1,9 milliard de personnes, soit 27 % de la population mondiale, vivaient dans des régions où l’eau pouvait se faire très rare. En 2050, ce seront entre 2,7 et 3,2 milliards de personnes qui seront concernées.
1,2 milliard à 1,6 milliard. Au début et jusqu’au milieu des années 2010, 1,9 milliard de personnes, soit 27 % de la population mondiale, vivaient dans des régions où l’eau pouvait se faire très rare. En 2050, ce seront entre 2,7 et 3,2 milliards de personnes qui seront concernées.
En 2019,
12 % de la population mondiale buvait de l’eau provenant de sources non
améliorées et insalubres. Plus de 30 % de la population mondiale, soit 2,4
milliards de personnes, vivent sans aucune forme d’assainissement.
Le
changement climatique devrait augmenter le nombre de régions en situation de
stress hydrique et aggraver les pénuries dans les régions où il y a déjà un
manque d’eau.
La
cryosphère est une source importante d’eau douce dans les montagnes et les
régions situées en aval. La contribution hydrologique annuelle provenant des
glaciers devrait très probablement culminer à l’échelle mondiale au plus tard à
la fin du XXIe siècle. Elle devrait ensuite décliner, ce qui ne sera pas
sans conséquences pour les réserves d’eau.
On estime
que le pic a été atteint en Europe centrale et au Caucase et qu’il le sera dans
la région du plateau tibétain entre 2030 et 2050. Étant donné que le
ruissellement provenant de la couverture neigeuse, du pergélisol et des
glaciers dans cette région contribue jusqu’à hauteur de 45 % au débit total des
cours d’eau, une diminution du débit aurait des conséquences sur les ressources
en eau disponibles pour 1,7 milliard de personnes.
Observation du système Terre pendant la COVID-19 (Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO et OMM)
La
pandémie de COVID-19 a eu des répercussions importantes sur les systèmes
mondiaux d’observation, ce qui a nui à son tour à la qualité des prévisions et
d’autres services liés au temps, au climat et à l’océan.
La
réduction de 75 à 80 % en moyenne des observations d’aéronefs en mars et avril
a dégradé les capacités de prévision des modèles météorologiques. Depuis le
mois de juin, on n’observe qu’une légère reprise. Les observations effectuées
dans les stations météorologiques manuelles, notamment en Afrique et en
Amérique du Sud, ont également été fortement perturbées.
Quant aux
observations hydrologiques comme celles concernant le débit des cours d’eau, la
situation est analogue à celle des mesures atmosphériques in situ. Les
systèmes automatisés continuent à fournir des données tandis que les stations
de jaugeage dont les mesures doivent faire l’objet d’une lecture manuelle sont
touchées.
En mars
2020, presque tous les navires de recherche océanographique ont été rappelés
dans leurs ports d’attache. Les navires commerciaux n’ont pas été en mesure de
fournir des observations océaniques et météorologiques essentielles, et les
bouées océaniques et autres systèmes n’ont pas pu être entretenus. Quatre
études de variables telles que le carbone, la température, la salinité et
l’alcalinité de l’eau, à toutes les profondeurs de l’océan, qui ne sont
réalisées qu’une fois par décennie, ont été annulées. Les mesures du carbone en
surface effectuées par les navires, qui nous renseignent sur l’évolution des
gaz à effet de serre, ont également cessé.
Les
impacts sur la surveillance du changement climatique seront de longue durée.
Les campagnes de mesure du bilan de masse des glaciers ou de l’épaisseur du
pergélisol, qui sont en général effectuées à la fin de la période de dégel, ne
pourront probablement pas avoir lieu ou seront limitées. Toutes ces
interruptions dans les observations vont provoquer des ruptures dans les séries
chronologiques des variables climatologiques essentielles nécessaires pour
surveiller la variabilité du climat et le changement climatiques ainsi que
leurs conséquences.
Notes à l’intention des rédacteurs :
Ce
rapport a été établi par l’Organisation météorologique mondiale (OMM), sous la
direction du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, afin de
rassembler les dernières données sur le climat d’un groupe de grands
partenaires mondiaux: OMM, Projet mondial sur le carbone (GCP), Commission
océanographique intergouvernementale de l’UNESCO (COI de l’UNESCO), Groupe
d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), Programme des
Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et Met Office. Le contenu de chacun
des chapitres est attribuable à chaque organisation respective. Le rapport est
disponible sous forme électronique à l’adresse suivante: public.wmo.int/en/resources/united_in_science
AGM
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