Covid-19 : Donald Trump veut éviter une pénurie de viande aux États-Unis
L’épidémie de Covid-19 aux États-Unis a mis à l’arrêt de
nombreuses usines de transformation de viande, déstabilisant tout le secteur.
Les usines de transformation de viande sont une « infrastructure
critique » et doivent continuer à fonctionner. C’est le mot
d’ordre lancé par Donald Trump mardi 28 avril dans un décret
présidentiel signé de sa main. L’annonce doit, entre autres, permettre de
couvrir juridiquement les entreprises dont les employés contraints de retourner
au travail seraient contaminés par le coronavirus, précise l’agence Reuters.
Ceux-ci ont pourtant des raisons de s’inquiéter : plus de
6 500 salariés des usines de production alimentaire ont été contaminés
depuis le début de l’épidémie de Covid-19 aux États-Unis, et 20 d’entre eux en
sont morts, d’après le syndicat américain UFCW. Ces contaminations avaient
abouti à la fermeture de nombreuses usines, déstabilisant toute la chaîne de
production et entraînant un risque de pénurie de viande aux États-Unis. Les
syndicats disent craindre aujourd’hui que les mesures de
protection ne soient pas suffisantes pour assurer un retour sécurisé des
travailleurs dans les usines.
Menace sur 80 % de la production
Une vingtaine d’usines d’abattage et de transformation de
viande appartenant aux plus grosses compagnies mondiales du secteur ont dû ces
dernières semaines suspendre leurs activités en Amérique du Nord. Or, la
fermeture d’une seule usine de traitement de bœuf pourrait signifier la perte
de 10 millions de portions alimentaires de bœuf par jour, estime le décret
présidentiel.
Le 23 avril, alors que 13 usines seulement avaient connu des
cessations temporaires d’activité, les capacités d’abattage de porcs avaient
chuté de 25 %, et celles de bœuf de 10 %, selon un autre syndicat de
travailleurs cité par le New York Times. Sans mesures prises
par le gouvernement, les capacités de production de viande auraient pu chuter
de 80 %, assure même un membre de l’administration américaine à l’agence
Reuters.
La situation est d’autant plus critique que des usines
connaissent les mêmes perturbations au Canada et au Brésil. Or, États-Unis,
Canada et Brésil représentent à eux seuls 65 % du commerce mondial de
viande, note Bloomberg. De plus, cette crise liée au Covid-19 vient
s’ajouter à celle de la peste porcine africaine qui sévit en Chine, où elle
a fait chuter de 29 % la production de viande de
porc au cours des trois premiers mois de 2020.
Hausse des prix
Autre source d’inquiétude pour les Américains : les
réouvertures d’usines souhaitées par Donald Trump ne pourront compenser les
pertes d’animaux, que les éleveurs ont été contraints d’euthanasier par
millions, faute de débouchés. « Des millions de livres de viande vont
disparaître », alerte Tyson Foods, principal producteur de viande
américain pour qui « la chaîne d’approvisionnement alimentaire est
rompue ».
D’autres experts sont moins alarmistes. Julie Niederhoff,
professeure associée en gestion de chaîne logistique à l’université de Syracuse
(New York), rappelle à CNN que la production alimentaire est
foisonnante aux États-Unis et que les Américains sont encore loin de manquer de
nourriture. Tout juste certains consommateurs devront-ils peut-être remplacer
temporairement leurs saucisses de porc favorites par des cuisses de poulets,
précise-t-elle.
Les prix, eux, ont déjà augmenté, et la pénurie devrait avoir
un impact certain sur le ticket de caisse des citoyens les plus précaires. Le
prix à la vente en gros de bœuf aux États-Unis a atteint un niveau record, et
celui de la vente en gros de porc a bondi de 30 % la semaine
dernière, souligne Bloomberg.
Une hausse des prix qui ne devrait pas perturber les
quelque 5 % d’Américains qui se déclarent végétariens mais qui
pourrait avoir un impact fort sur les autres : on consomme en moyenne aux
États-Unis plus de 100 kg de viande par personne et par an
(contre moins de 56 kg en France). Un penchant pour les
protéines animales responsable de dégâts environnementaux majeurs et favorisé par des
prix tendanciellement à la baisse ces dernières années.
AGM
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