Planter des arbres en ville peut sauver des dizaines de milliers de vies par an
Si on vous dit qu'en plantant quelques arbres dans un
espace urbain on peut sauver des milliers de vies, vous nous croyez ? Les
études se suivent et confirment toutes que la végétation en ville a un impact
remarquable sur la qualité de vie et la santé des citadins.
“Planter pour un air sain”
L'étude “Planter pour un air sain”, présentée le 31
octobre 2016 lors de l'assemblée annuelle de l'American
Public Health Association[1], propose une analyse globale du rôle des arbres
urbains dans la lutte contre la pollution
par les particules et la chaleur extrême. Cette étude établit un classement
mondial des effets de la plantation d'arbres dans un échantillon de 245
métropoles, parmi les plus grandes du monde.
L'objectif ? Fournir aux administrations municipales
les données nécessaires pour démontrer qu'investir dans la plantation d'arbres
peut améliorer la santé publique dans leur ville, et identifier les villes
où un tel investissement pourrait avoir le plus fort impact sur la vie des
habitants.
Améliorer la santé publique grâce aux arbres urbains
Lutter contre la pollution atmosphérique
Asthme, cardiopathies, AVC... Tels sont les effets sur
notre santé des particules fines et des polluants atmosphériques qui
s'accumulent dans nos villes et s'infiltrent dans nos poumons, faisant chaque
année plus de trois
millions de victimes au niveau mondial.
En ville, la majeure partie de la pollution
atmosphérique est causée par la combustion des carburants fossiles,
comme ceux utilisés par les moteurs automobiles (principalement les diesel).
The Nature Conservancy souligne le possible impact des
arbres dans la réduction des concentrations de particules et des polluants
atmosphériques : "un arbre est capable d'éliminer jusqu'à un quart de
la pollution par les particules dans un rayon d'une centaine de
mètres. Judicieusement planté, il constitue une barrière très efficace pour
filtrer l'air vicié et protéger les personnes vivant à proximité",
explique The Nature Conservancy.
Ainsi, de grands arbres peuvent retenir jusqu'à 5,4 tonnes de CO2 par an et 20 kg de poussière, selon le rapport Asterès réalisé pour le compte de l'Union Nationale des Entreprises du Paysage (Unep).
Ainsi, de grands arbres peuvent retenir jusqu'à 5,4 tonnes de CO2 par an et 20 kg de poussière, selon le rapport Asterès réalisé pour le compte de l'Union Nationale des Entreprises du Paysage (Unep).
Comment expliquer ce phénomène ? C'est très simple
: les feuilles des arbres captent les particules fines et les
emprisonnent, empêchant ainsi la propagation des polluants. Cet effet favorable
de la forêt, Christophe
Magdelaine -responsable et fondateur du site notre-planete.info- a pu
le vérifier et le mesurer dans le bois de Vincennes. Ainsi, le long des axes
routiers, les surfaces foliaires participent à la photosynthèse, et les parties
ligneuses captent en effet les particules atmosphériques et constituent des
barrières protectrices pour les usagers de l'espace vert.
D'après Robert McDonald,
chercheur en chef pour les métropoles mondiales à The Nature Conservancy et
auteur principal de l'étude, les concentrations de particules peuvent
être réduites de 7 à 24 % à proximité immédiate d'un arbre.
Il est également possible de cibler les lieux de
plantation d'arbres, afin de protéger les zones particulièrement
touchées par la pollution -près des autoroutes ou des zones
industrielles par exemple- ou les publics vulnérables : dans
les écoles, crèches, maisons de retraite et hôpitaux notamment.
Protéger les populations des effets du réchauffement climatique
Outre le problème de la pollution, les villes sont en
effet également confrontées au danger de la chaleur urbaine - phénomène
météorologique accru par le changement
climatique et extrêmement meurtrier.
En ville, les épisodes caniculaires sont de
plus en plus fréquents et intenses, et les vagues de chaleur mortelles -
pour les personnes âgées en premier chef - se multiplient.
En été 2003,
la canicule a fait environ 20 000 victimes en France, en l'espace d'une
semaine, d'après l'Institut National de Veille Sanitaire. "Les morts
étaient tellement nombreux que la morgue de Paris s'est retrouvée saturée,
et les cadavres ont dû être entreposés dans le hangar réfrigéré d'un
grand marché de fruits et légumes", explique-t-on.
Si ils sont capables d'assainir l'air, les arbres
peuvent aussi le rafraîchir localement
et diminuer l'effet d'îlot
de chaleur urbain. Ce phénomène se traduit par la persistance d'un dôme
thermique, créant une sorte de microclimat urbain où les températures sont
significativement plus élevées : plus on s'approche du centre de la ville, plus
il est dense et haut, et plus le thermomètre grimpe.
D'après l'étude, élaborée en collaboration avec
le C40 Cities Climate Leadership Group,
il est démontré que les arbres plantés en ville seraient capables d'abaisser la
température de 2 à 4 degrés celsius autour d'eux. Un chiffre loin d'être
négligeable : nos mesures ont montré que l'îlot de chaleur urbain,
par exemple sur le coeur d'agglomération parisienne, augmente la
température d'environ 4°C par rapport à la grande couronne. C'est très
significatif.
Un double bénéfice pour un investissement minime
« Les arbres peuvent avoir un impact local
significatif sur les niveaux de pollution et les températures »,
explique Robert McDonald. Ce double bénéfice s'accompagne - c'est là qu'est la
révolution - d'un faible coût tant environnemental que financier. Mieux vaut,
pour le bien de notre environnement et de nos finances, planter des arbres en
ville plutôt qu'installer des épurateurs dans les cheminées industrielles ou
des purificateurs
d'air comme à Pékin, aussi esthétiques et étonnants soient-ils !
D'après l'étude Planter pour un air sain de The Nature
Conservancy, il est établi qu'un investissement global de 3,2 milliards de
dollars par an - soit moins de 4 dollars par résident -
peut sauver des dizaines de milliers de vies chaque année et
améliorer la santé de dizaines de millions de personnes. “Pour environ 4 $
par année par personne, les villes du monde entier pourraient planter et
entretenir suffisamment d'arbres supplémentaires pour sauver 11 000 à 36 000
vies chaque année”, explique
Robert McDonald sur son blog.
Dans certaines villes plus que dans d'autres, la plantation
d'arbres peut s'avérer très avantageuse. Le classement mondial proposé par
l'étude examine les retours sur investissement selon les effets positifs
mesurés par habitant. “Les villes présentant une forte densité de
population, des niveaux de pollution et de chaleur élevés et dans lesquelles
les coûts de la plantation d'arbres sont faibles sont celles qui obtiennent le
meilleur retour sur investissement”, montre l'étude.
Sur le podium des pays où cette mesure serait la plus
efficace : le Pakistan,
le Bangladesh et l'Inde principalement, suivis du Sénégal, du Népal, de
l'Egypte et de la Sierra Leone.
Arbres en ville : une stratégie d'assainissement limitée mais efficace
Le problème survient en hiver, lorsque s'interrompt le
cycle végétatif. A cette période de l'année, les bénéfices se voient fortement
réduits, sauf si des arbustes ou arbres à feuillage persistant ont été plantés.
Par ailleurs, Robert McDonald insiste sur l'échelle
locale à laquelle se mesurent les bénéfices dus à l'action purificatrice des
arbres. C'est seulement à moins de 100 mètres d'un arbre que se
mesurent ses effets. Au-delà de cette distance, l'air se confond avec celui
déjà vicié de la ville.
Arbres en ville : de multiples bénéfices
Alors que plus
de 75 % de la population mondiale vit dans des zones urbaines, il devient
urgent d'investir dans des villes
durables. A ce titre, la plantation d'arbres constitue une
stratégie facilement exploitable.
Les arbres urbains représentent une solution très
avantageuse et peu coûteuse pour lutter contre la pollution atmosphérique et la
chaleur en ville. En plus de ce double avantage, ils offrent également un cadre
de vie agréable aux citadins en multipliant les espaces verts et en
fournissant un habitat pour la faune urbaine (oiseaux
notamment). Ils permettent également de contrôler le niveau des eaux
pluviales.
C'est également le point de vue d'un nouveau
rapport de l'OMS faisant la synthèse des impacts sanitaire des espaces
verts en milieu urbain. Ceux-ci "apportent de nombreux bienfaits à la
santé publique, notamment en termes de relaxation psychologique et de réduction
du stress, d’augmentation de l’activité physique et de réduction potentielle de
l’exposition à la pollution de l’air, au bruit et à la chaleur excessive".
Ainsi, en France, augmenter le nombre d’espaces verts
de 10 % dans les villes permettrait de réduire les dépenses de santé de 94
millions d’euros, en diminuant la prévalence de l’asthme et de l’hypertension
(respectivement 56 et 38 millions d’euros d’économies pour ces deux
maladies)[2].
Chiffres issus de l'étude « Les espaces verts urbains - Lieux de santé publique, vecteurs d’activité économique » - Rapport ASTERES, pour le compte de l'UNION NATIONALE DES ENTREPRISES DU PAYSAGE – réalisé en mai 2016 par Nicolas Bouzou et Christophe Marques. Les chiffres cités sont valables dans un territoire et à un moment donnés Union Nationale des Entreprises du Paysage - Licence : DR |
« Les arbres ne peuvent résoudre à eux seuls
tous les enjeux mondiaux en matière de pollution atmosphérique et de chaleur,
mais ils constituent une part importante de la solution », déclare M.
McDonald.
600 professionnels de santé appellent à verdir les villes
Avec tous ces bénéfices facilement réalisables, il
n'est pas étonnant que les professionnels de santé s'emparent de ce sujet.
Ainsi, fin février 2020, plus de 600 médecins canadiens ont appelé la province
du Québec à réaliser des investissements majeurs et réguliers dans les villes.
Un verdissement « optimal » des villes serait de 40 %
de canopée contre 10 à 20 % actuellement explique Alain Poirier, médecin
spécialiste de l'Institut national de
santé publique du Québec. Il précise que le verdissement entraînerait aussi
une diminution des cas d'asthme, d'autisme, ainsi que des risques de diabète,
d'hypertension artérielle, d'embonpoint ou d'obésité et des cas de mortalité
respiratoire ou des suites de cancers.
Au total, 600 médecins et professionnels de la santé
du Québec et plus de 45 partenaires, dont des universités et des villes,
demandent au gouvernement du Québec de consacrer chaque année 1 % du budget
dédié aux infrastructures publiques à la plantation d'arbres, soit 170 millions
de dollars par an, un coût largement inférieur aux bénéfices attendus en terme
de santé publique notamment.
Que pouvons-nous faire pour améliorer la qualité de l'air dans notre ville ?
Outre la transition vers des modes
de déplacements alternatifs : vélo, marche à pied... Pour les petits
trajets et l'achat de voitures plus "propres" : électriques et
hybrides, nous pouvons également planter des arbustes et des arbres (même
modestes) et réclamer des espaces verts dans nos villes.
En effet, dans un sondage réalisé début mars[3] sur
les Français et le vert en ville, les Français plébiscitent les bienfaits des
espaces verts :
- 92 % des
interrogés estiment que les espaces verts en ville améliorent le moral des
habitants,
- 82 % pensent
le vert en ville contribue à renforcer les liens entre les habitants,
- 92 % y voient
des îlots de rafraichissement des centres-villes,
- 91 % y voient
un levier d’amélioration de la qualité de l’air,
- 89 %
perçoivent l’opportunité de créer des lieux de biodiversité.
Certes, tout le monde n'a pas la chance d'avoir un
jardin, ce havre de paix et de verdure qui est trop souvent le seul lien qu'il nous
reste avec la nature. Avec l'artificialisation des sols, le jardin
doit demeurer un espace vivant, pour notre détente, notre éveil et la
sauvegarde de la biodiversité. C'est pourquoi votre jardin ne doit pas
être artificialisé (gravillons, goudron...) mais laisser place à une
nature quelque peu sauvage avec quelques arbres pour purifier notre air, devenu
cancérogène !
Notes
- L'American
Public Health Association est une organisation fondée par des médecins,
qui réunit plusieurs professionnels de la santé aux Etats Unis et se donne
pour objectif d'améliorer la santé publique.
- Chiffres
issus de l’étude « Les espaces verts urbains - Lieux de santé publique,
vecteurs d’activité économique » - Rapport ASTERES, pour le compte de
l'Union Nationale des Entreprises du Paysage – réalisé en mai 2016 par
Nicolas Bouzou et Christophe Marques. Les chiffres cités sont valables
dans un territoire et à un moment donnés
- Enquête
réalisée par IFOP pour le compte d'ECT (aménageur de projets durables Ã
partir de terres issues des chantiers BTP). L’enquête a été menée auprès
d’un échantillon de 2 005 citadins, représentatif de la population majeure
résident dans des communes urbaines de France métropolitaine.
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