Nucléaire : qu’appelle-t-on l’eau « lourde » ?
Dans
la plupart des réacteurs nucléaires actuellement en service (à l’exception
des réacteurs à neutrons rapides), un
« modérateur » est nécessaire pour ralentir les neutrons
issus des fissions nucléaires(1).
Il existe principalement trois modérateurs : le graphite, l’eau (aussi
qualifiée d’eau « ordinaire » ou « légère ») et l’eau
« lourde ».
L’eau
« lourde » désigne l’oxyde de deutérium (D2O), molécule
composée d’un atome d’oxygène et de deux atomes de deutérium. Le deutérium est
un isotope de l’hydrogène : son noyau possède un proton comme l’hydrogène
mais aussi un neutron (alors que l’hydrogène n’en a pas). L’eau lourde
possède ainsi les mêmes propriétés chimiques que l’eau ordinaire (H2O)
mais elle est plus dense(2) que
cette dernière car elle a une masse atomique plus élevée (20 contre 18), d’où
son appellation.
Dans
les réacteurs dits à « eau lourde », le combustible peut être peu ou
pas enrichi (en uranium 235) car l’eau lourde « modère » la réaction
en chaîne efficacement et surtout capture beaucoup moins de neutrons de façon
stérile que l’eau ordinaire : elle augmente donc la probabilité des fissions
d’atomes d’uranium 235 par unité de volume. L’eau lourde ne nécessite ainsi pas
d’installation
d’enrichissement mais elle est plus chère que l’eau ordinaire et les
réacteurs qu’elle modère sont moins compacts que les réacteurs à eau légère,
les barres de combustible devant être plus espacés.
Précisons
que les réacteurs nucléaires utilisant l’eau lourde sont aujourd’hui tous
refroidis par le modérateur lui-même (l’eau lourde, les réacteurs sont dits
« PHWR »(3))
alors que certains d’entre eux avaient été refroidis par un caloporteur
distinct dans le passé (le CO2 dans les réacteurs dits
« HWGCR »(4)).
Sur les
441 réacteurs nucléaires « opérationnels » dans le monde, 49 sont
actuellement modérés par de l’eau lourde selon l’AIEA(5).
La majorité d’entre eux sont situés au Canada (19 réacteurs de type
« CANDU ») et en Inde (18 réacteurs). La France a exploité dans le
passé une centrale à eau lourde en Bretagne (Brennilis) qui a été arrêtée
en 1985.
Sources
/ Notes
- Les ralentir permet d’augmenter la
probabilité que ceux-ci provoquent de nouvelles fissions et entretiennent
ainsi une « réaction en chaîne ».
- Densité d’environ 1,1 à 20°C
- Pressurized Heavy Water moderated and
cooled Reactor
- Heavy Water Gas Cooled Reactor
- Base de données PRIS de l'AIEA
A.G.M
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