LES MAJORS PÉTROLIÈRES ONT APPROUVÉ 50 MILLIARDS DE DOLLARS DE PROJETS INCOMPATIBLES AVEC L’ACCORD DE PARIS
Pour
respecter les objectifs climatiques, la demande de combustibles fossiles
devra inexorablement diminuer. Pourtant, les principales majors pétrolières et
gazières continuent de parier contre l'Accord de Paris. Selon une nouvelle
étude publiée le 6 septembre par Carbon Tracker, celles-ci ont validé pour 50
milliards de dollars d'investissements dans des projets qui ne pourront pas
être rentables dans un scénario de réchauffement limité à 1,6°C.
Pour
atteindre les objectifs climatiques dans un scénario de réchauffement à 1,6°C
d’ici 2100, la demande de combustibles fossiles devra diminuer et seuls les
projets aux coûts les plus bas – en-dessous de 40 dollars le baril
– généreront un rendement satisfaisant, selon une étude de Carbon Tracker
(1) publiée le 6 septembre. Et pourtant, les principales entreprises
pétrolières et gazières continuent d'investir à rebours de ce constat. Entre
2019 et 2030, elles vont investir près de 50 milliards de dollars dans des
projets qui sont incompatibles avec l’Accord de Paris.
Carbon
Tracker a calculé que 83 % des CAPEX (dépenses d'investissement) 2019-2030 pour
les nouveaux projets pétroliers et gaziers sont susceptibles de devenir des
actifs échoués dans un scénario 1,6°C de réchauffement (le scénario le plus
ambitieux de l'Agence Internationale de l'énergie). A 1,7-1,8°C de
réchauffement, 60 % seraient toujours en risque.
En
tous, ce sont donc une vingtaine de projets qui sont identifiés comme
incompatibles avec l'Accord de Paris et nécessitant un prix du baril d'au moins
60 dollars pour être effectivement rentables.
Principaux projets identifiés par Carbon Tracker comme étant incompatibles avec l'Accord de Paris.
Aucun projet de sables bitumineux compatible avec l'Accord de Paris
Parmi
ces projets, on trouve celui d'Aspen sur l'exploitation des sables bitumineux
porté par ExxonMobil au Canada, d’une valeur de 2,6 milliards de dollars. Selon
les estimations de Carbon Tracker, celui-ci nécessitera un prix du pétrole de
plus de 80 $ le baril pour un rendement de 15 %. ExxonMobil apparaît ainsi
comme l’entreprise la plus exposée au risque climatique avec 90 % de ses
investissements d’ici 2030 incompatibles avec l’Accord de Paris.
Entreprises dont les capex 2019-2030 pour les nouveaux projets pétroliers et gaziers sont les plus exposés au risque climatique dans un scénario 1,6°C. (Carbon Tracker)
Dans
le palmarès, Total ne fait pas non plus bonne figure avec 67 % de ses
investissements considérés comme à risque dans un scénario 1,6 ̊C, juste
derrière Shell. La major française est notamment pointée du doigt pour le
projet Zinia 2 d’offshore profond en Angola, d’une valeur totale de 1,3
milliard de dollars. Shell pour un projet géant de gaz naturel liquéfié (GNL)
au Canada, pour 13 milliards de dollars. Chevron, BP et Eni sont aussi
concernés, avec entre 55 et 60 % de leur Capex exposé.
Selon
Carbon Tracker, aucun nouveau projet de sables bitumineux n'est cohérent avec
les objectifs climatiques pris à Paris en 2015. La plupart des projets en
Arctique sont coûteux et à haut risque. L'investissement dans l'huile de
schiste est également très sensible à la demande. Dans un scénario 2.7°C
(scénario business as usual de l'AIE), il faudra investir 1,1 milliard de
dollars dans le monde, mais ce chiffre chute de 90 % à seulement 0,1 milliard
de dollars dans un scénario à 1,6°C.
2 200 milliards de dollars de pertes
Le
think-tank alerte sur le fait que les sociétés pétrolières et gazières risquent
ainsi de perdre 2 200 milliards de dollars d’ici 2030 en fondant leurs
décisions d'investissement sur un monde à 2,7°C. Il interpelle notamment les
investisseurs, au moment où ces derniers - avec la société civile - font de
plus en plus pression sur la direction des entreprises pour qu'elles prennent
en compte l'urgence climatique.
"Toutes
les grandes compagnies pétrolières sont en train de parier massivement contre
l'objectif de limiter le réchauffement à 1.5˚C, et investissent dans des
projets incompatibles avec l’accord de Paris” regrette Andrew
Grant, analyste chez Carbon Tracker et auteur du rapport.
"Les
investisseurs devraient remettre en question les dépenses des entreprises pour
la production de nouveaux combustibles fossiles. Or,
la meilleure façon de préserver la valeur pour les actionnaires et de s'aligner
sur les objectifs climatiques est de se concentrer sur des projets à faible
coût qui dégageront les meilleurs rendements" conclut-t-il.
A.G.M
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire