L’AFRIQUE, PROCHAINE "PLAQUE TOURNANTE" DES DÉCHETS PLASTIQUES PROVENANT DES ÉTATS-UNIS
Alors que
l'Asie, à l'instar de la Chine qui était encore il y a deux ans la première
destination mondiale du recyclage, ne veut plus être la poubelle des déchets
plastiques mondiaux, les industriels du secteur jettent désormais leur dévolu
sur l'Afrique. Dans le cadre d'un nouvel accord commercial entre les États-Unis
et le Kenya, ils somment les autorités de lever les restrictions
environnementales pour faire du pays la porte d'entrée des déchets plastiques
sur le continent.
Après
l’Asie, l’Afrique sera-t-elle bientôt inondée par les déchets plastiques
américains ? C’est en tout cas ce que souhaitent les industriels regroupés au
sein de l’American Chemistry Council. Le New York Times vient en effet de
révéler une lettre du directeur commercial de cette association regroupant de puissants
groupes de produits chimiques et d’énergies fossiles tels Shell, Chevron,
DuPont et Dow ou encore Exxon Mobil, adressée aux autorités américaines.
Alors que
les États-Unis et le Kenya rediscutent en ce moment un accord commercial qui
doit s’achever en 2025, Ed Bryztwa demande à l’administration Trump "d’interdire
l’imposition de limites nationales sur la production ou la consommation de
produits chimiques et de plastiques et de lever les restrictions sur le
commerce transfrontalier des matériaux et des matières premières". Le
but, selon lui, est que le Kenya puisse se développer en organisant une filière
de recyclage du plastique dans la région. "Nous prévoyons que le
Kenya pourrait servir à l’avenir de plaque tournante pour la fourniture de
produits chimiques et plastiques fabriqués aux Etats-Unis à d’autres marchés en
Afrique", espère Ed Bryztwa.
L'Asie ferme ses portes
Si les
industriels se tournent vers le continent africain, c’est que la Chine, qui
importait jusqu’ici la majeure partie des déchets plastiques américains, a
décidé de mettre fin à ce commerce en 2018. Dans un premier temps, les
industriels ont jeté leur dévolu sur la Malaisie, qui, en quelques mois, est
devenu la première destination mondiale du recyclage. Mais face à l’explosion des
déchets, elle a décidé, elle aussi, de fermer ses portes. "La
Malaisie, comme tout autre pays en développement, a le droit de vivre dans de
l’air pur, de l’eau, des ressources durables et un environnement propre",
déclarait alors la ministre de l’Environnement.
Les
regards se posent désormais sur l’Afrique, avec, comme porte d’entrée, le
Kenya, dont le président, Uhuru Kenyatta, a fait valoir son impatience à
conclure un accord avec les États-Unis alors que la pandémie mondiale a mis
l’économie du pays à genoux. Mais les associations environnementales sont vent
debout contre ce nouveau projet.
"L'Afrique est à l'avant-garde de la guerre contre les plastiques"
"L'Afrique
est à l'avant-garde de la guerre contre les plastiques, 34 pays sur 54 ayant
adopté une réglementation pour éliminer progressivement les plastiques à usage
unique", a déclaré Fredrick Njehu, conseiller politique
principal de Greenpeace Afrique. "Le gouvernement kényan ne
devrait pas revenir sur les progrès réalisés dans ses ambitions sans plastique
en se pliant à la pression des géants des combustibles fossiles, car il risque
de faire dérailler les progrès réalisés sur tout le continent."
Il est
toujours difficile de savoir le poids qu’auront les industriels dans le nouvel
accord entre les États-Unis et le Kenya mais, comme le souligne au New York
Times Sharon Treat, avocate à l’Institut non partisan pour l’agriculture et la
politique commerciale, les lobbys d’entreprise "font souvent des
propositions très spécifiques, que le gouvernement reprend ensuite". D’autant
qu’avec la chute du cours de pétrole, les industriels voient dans la production
de plastique l’avenir du secteur. Cette dernière, comme le souligne RFI,
absorbe déjà la moitié du pétrole mondial avec 350 millions de tonnes de
plastiques produits par an.
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