Renforcer l’action climatique sur les systèmes alimentaires peut permettre de réduire de 20 % les émissions mondiales nécessaires d'ici 2050
Les
décideurs politiques peuvent améliorer les chances d'atteindre les objectifs
climat et limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C en prenant des
engagements plus spécifiques pour transformer les systèmes alimentaires
nationaux. Enhancing Nationally Determined Contributions (NDCs) for
Food Systems, un nouveau rapport publié aujourd'hui par le WWF, le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), EAT et Climate Focus, constate que les
pays passent à côté d'importantes opportunités de réduire les émissions de gaz
à effet de serre et identifie 16 mesures « de la ferme à
l’assiette » que les décideurs politiques pourraient mettre en œuvre.
Actuellement, les régimes alimentaires plus sains, les pertes et le gaspillage
alimentaires sont largement ignorés, mais en les intégrant dans les plans
climatiques nationaux, les décideurs politiques peuvent améliorer de 25 % la
contribution des systèmes alimentaires à l'atténuation et à l'adaptation
climatique. Dans le cadre de l'accord de Paris de 2015, les pays sont censés
réviser ou soumettre à nouveau leurs contributions nationales tous les cinq
ans. Cette année, les décideurs politiques ont donc la possibilité d'adopter
des solutions liées aux systèmes alimentaires et de se fixer des objectifs et
prendre des mesures plus ambitieuses afin de réduire les émissions de gaz à
effet de serre et, par conséquent, améliorer la biodiversité, la sécurité
alimentaire et la santé publique.
Les
systèmes alimentaires - qui regroupent tous les éléments et activités liés à la
production, la transformation, la distribution, la préparation et la
consommation des aliments - représentent jusqu'à 37 % de
l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre ; si l'on poursuit ce statu
quo, on épuisera à lui seul les budgets d'émissions compatibles de 1,5°C pour tous les
secteurs. Bien que 89 % des CDN mentionnent la production agricole, ces
objectives sont principalement inclus dans des objectifs plus larges liés à
l’utilisation des terres. D’autres actions, telles que la réduction des pertes
et gaspillage alimentaires, ou le passage à des régimes alimentaires plus
durables, sont largement oubliés, alors qu'elles sont une opportunité unique de
réduire les émissions de pas moins de 12,5 Gt CO2 eq - ce qui
revient à enlever 2,7 milliards de voitures de la circulation.
"Des
engagements ambitieux, définis dans le temps et mesurables en matière de
transformation des systèmes alimentaires sont nécessaires si nous voulons
atteindre un avenir à 1,5°C. Ne pas le faire, c'est ignorer l'un des principaux
moteurs de la crise climatique actuelle. Sans action sur la façon dont nous
produisons et consommons la nourriture, nous ne pouvons pas atteindre nos
objectifs en matière de climat ou de biodiversité, qui sont le fondement de la
sécurité alimentaire, de la prévention de l'apparition de maladies et, en fin
de compte, de la réalisation des objectifs de développement durable. C'est
pourquoi nous demandons instamment aux gouvernements d'inclure des actions lies
aux systèmes alimentaires respectueuses du climat et de la nature dans les CDN
qui seront soumis cette année", a déclaré Marco Lambertini,
Directeur Général du WWF-International.
"La
pandémie a mis en évidence la fragilité de nos systèmes d'approvisionnement
alimentaire, des chaînes de valeur complexes aux impacts sur nos écosystèmes.
Mais elle a également démontré que les entreprises et les individus sont prêts
suite à cette crise de reconstruire différemment. Cette crise nous offre une
chance de repenser radicalement notre façon de produire et de consommer les
aliments. Par exemple, réorienter la consommation en réduisant de moitié le
gaspillage alimentaire et en catalysant un changement vers des régimes
alimentaires plus riches en plantes, est également un puissant outil
d'atténuation du climat dont il faut tirer parti. C'est à nous de saisir cette
opportunité et de mettre les systèmes alimentaires durables au cœur de la
reprise verte", a déclaré Inger Andersen, Directrice Exécutive du
PNUE.
Les 16
actions identifiées dans le rapport comprennent la réduction du changement
d'affectation des terres et la conversion des habitats naturels, ce qui
pourrait réduire les émissions de 4,6 Gt CO2 eq par an. De même, la
réduction des pertes et des déchets alimentaires, qui représentent 8 % de l'ensemble
des émissions de GES, pourrait réduire les émissions de 4,5 Gt CO2 eq par
an. Pourtant, seuls 11 pays mentionnent actuellement la perte alimentaire dans
leurs plans et aucun ne tient compte du gaspillage alimentaire. L'amélioration
des méthodes de production et la réduction des émissions de méthane liés au
bétail pourraient réduire les émissions de 1,44 Gt CO2 eq par an, mais des
réductions bien plus importantes pourraient être réalisées en adoptant des
régimes alimentaires plus sains et plus durables, avec une proportion plus
élevée d'aliments d'origine végétale que d'aliments d'origine animale, ce qui
permettrait d'éviter des émissions de 8 Gt CO2 eq chaque année. Aucun plan
national actuel sur le climat ne traite explicitement de régimes alimentaires
plus durables.
Le
rapport constate que les pays développés sont moins enclins que les pays en
développement à prévoir des mesures d'atténuation sectorielles pour
l'agriculture dans leurs plans climatiques actuels, bien que dans l’absolu, le
nombre de mesures spécifiques visant à réduire les émissions dans le système
alimentaire des pays en développement sont faibles. Depuis août 2020, 15 mises
à jour et révisions des NDC ont été soumises et bien que certaines concernent
l'agriculture, les actions font toujours défaut. Les premiers indicateurs
montrent que la consommation alimentaire durable et les pertes et gaspillage
alimentaires continueront d'être ignorés dans le processus de révision. Aucune
des mises à jour et révisions soumises ne les mentionne dans leurs
contributions ou politiques et mesures d'atténuation.
"Les
systèmes alimentaires sont une opportunité d'atténuation négligée et c’est une
des rares opportunité d'atténuation qui présente autant de bénéfices de
développement durable. La réduction d’une consommation excessive de viande,
l'amélioration des installations de stockage et la réduction du gaspillage
alimentaire sont bonnes pour notre santé et améliorent la sécurité alimentaire.
Avec une liste de cas et exemples concrets d'activités et d'objectifs, ce
rapport fournit des conseils aux décideurs politiques pour intégrer les
systèmes alimentaires dans leurs stratégies climatiques nationales", a
déclaré Charlotte Streck, co-fondatrice et directrice de Climate Focus.
"
Résoudre la problématique alimentaire n'est pas seulement une condition
préalable à la réalisation de l'Agenda 2030, mais elle est aussi importante que
la transition énergétique pour respecter les objectifs de l'Accord de Paris sur
le climat. Le passage à une production plus propre et l'adoption de régimes
alimentaires sains, principalement à base de plantes, abordables et
accessibles, ainsi que la réduction de moitié du gaspillage et des pertes
alimentaires, sont des actions cruciales qui doivent être intégrées dans les
plans d'action climatique de pays avec des ambitions claires. Alors que nous
entrons dans la décennie d'action,
faisons en sorte qu'elle soit la décennie de la mise en place d'un avenir
alimentaire sain, durable et équitable pour tous", a déclaré le Dr
Gunhild Stordalen, fondatrice et présidente exécutive de l'EAT.
En plus
d'une ambition croissante dans leurs CDN, les pays ont un certain nombre
d'opportunités supplémentaires pour réduire les émissions et préserver la
nature par le biais des systèmes alimentaires. En 2021, dans le cadre de la
Conférence des parties à la Convention des Nations Unies sur la Biodiversité
(COP 15), les dirigeants mondiaux peuvent convenir d'un "New Deal"
pour la nature et les hommes, afin de stopper et d'inverser la perte de la
biodiversité. De plus , le tout premier sommet
des Nations unies sur les systèmes alimentaires aura lieu en 2021 ;
comme l’a évoqué le Secrétaire Général des Nations Unies, António Guterres,
lors du lancement du sommet, "la transformation des systèmes alimentaires
est essentielle pour atteindre tous les objectifs de développement durable".
AGM
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