Le gouvernement Trump détricote la loi protégeant les espèces menacées
Washington
(AFP)
Lamantins,
baleines à bosse, loups gris... De nombreuses espèces menacées sur le
territoire américain ont bénéficié depuis les années 1970 d'une loi que le
gouvernement du président Donald Trump a substantiellement assoupli au profit
des entreprises, dénoncent ses opposants.
L'emblème
même du pays, le pygargue à tête blanche, a notamment été sauvé de l'extinction
grâce à l'Endangered Species Act de 1973, dont l'assouplissement a été entériné
lundi.
D'après
des sondages, une grande majorité des citoyens américains sont attachés à cette
loi faisant référence sur le plan mondial en matière de sauvegarde de
l'environnement.
Mais
l'administration du président républicain Donald Trump a souhaité y apporter
des changements significatifs, supprimant une clause accordant automatiquement
la même protection aux espèces dites "menacées" qu'aux espèces
"en danger d'extinction" immédiat.
"Jusqu'à
maintenant, une espèce qui entrait dans la liste des espèces menacées faisait
immédiatement l'objet de mesures de protection", a expliqué à l'AFP
Kristen Boyles, avocate pour l'ONG Earthjustice.
"A
présent, elle ne sera pas plus protégée qu'avant son inscription", du
moins tant qu'une étude spécifique pour cette espèce n'aura pas été menée, a
déploré la spécialiste.
La
nouvelle version de la loi supprime aussi une phrase stipulant que les
considérations économiques ne doivent pas entrer en ligne de compte dans les
décisions visant à protéger la faune sauvage.
De
nombreuses organisations de défense de l'environnement ont dénoncé ces
changements, favorables selon elles aux seuls intérêts des entreprises et qui
risquent d'aboutir à une destruction progressive de l'habitat des espèces
protégées.
Les
entreprises pourront en effet dorénavant construire des routes, des oléoducs,
des gazoducs, des mines et autres projets industriels dans des zones désignées
comme "habitat essentiel" pour une espèce menacée. "Une mort à
petit feu" pour les animaux concernés, estime Mme Boyles.
Le
ministre de l'Intérieur David Bernhardt, ancien représentant du lobby des
hydrocarbures, s'est quant à lui réjoui de ces "améliorations", qui
vont permettre selon lui "d'affecter plus de ressources là où elles seront
le plus utiles: la conservation sur le terrain".
Ces
"révisions" s'inscrivent dans le cadre de la politique voulue par le
président Trump "d'alléger le carcan réglementaire qui pèse sur le public
américain, sans sacrifier les objectifs de protection et de reconstitution de
nos espèces", a insisté le ministre du Commerce Wilbur Ross.
-
"Un clou dans notre cercueil" -
Les
adversaires démocrates de Donald Trump ont vivement critiqué la réforme.
"Pendant des décennies, l'Endangered Species Act a protégé de l'extinction
notre faune sauvage la plus vulnérable. Voilà maintenant que le président Trump
veut s'en débarrasser complètement", a tweeté l'ancien vice-président Joe
Biden, favori de la primaire démocrate pour la présidentielle de 2020.
Les
procureurs généraux de Californie et du Massachusetts ont eux déjà annoncé
qu'ils allaient porter l'affaire en justice.
En
revenant sur cette loi, "le gouvernement Trump planterait un nouveau clou
dans notre cercueil (...) Nous sommes prêts à nous battre pour préserver cette
loi importante; les espèces avec lesquelles nous partageons cette planète, et
dont nous dépendons, le méritent bien", affirme ainsi dans un communiqué
le procureur californien Xavier Becerra.
Les
nouvelles dispositions "mettent en danger le tourisme local et l'industrie
des loisirs" aux Etats-Unis, a fait valoir son homologue du Massachusetts
Maura Healey dans un communiqué conjoint.
Lamantins,
baleines à bosse, alligators américains... Des dizaines d'espèces ont bénéficié
de l'Endangered Species Act depuis 1973.
Le
loup gris (Canis lupus), dont la population a été décimée au début du 20e
siècle, a probablement été sauvée de l'extinction par cette loi, tout comme le
pygargue à tête blanche (Haliaeetus leucocephalus), aussi appelé aigle pêcheur,
passé de 417 spécimens en 1963 à quelque 10.000 couples aujourd'hui.
Depuis
l'élection de Donald Trump en 2016, le gouvernement américain a modifié plus de
80 textes ayant trait à la santé humaine ou à l'environnement, en invoquant la
nécessité d'assouplir les réglementations encadrant les entreprises.
Tout
récemment, l'administration a ainsi levé l'interdiction de pièges empoisonnés
au cyanure destinés à tuer renards, coyotes et chiens sauvages. L'utilisation
de ces pièges M-44 avait été suspendue l'an dernier après que l'un de ces
engins, qui ressemblent à des arroseurs automatiques, eut intoxiqué un enfant
et tué son chien dans l'Idaho.
A.G.M
©
2019 AFP
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